• Le premier festival de polar corse et méditerranéen aura lieu du 6 au 8 juillet prochain à Ajaccio sous l’égide de Corsicapolar, association d’auteurs corses de polars.

    Depuis les années 1990, on a vu émerger le polar régional. Alors que Marseille et la Corse ont alimenté l’imaginaire de bon nombre d’auteurs et de cinéastes, il faudra attendre 1995 pour que Jean-Claude Izzo consacre le polar marseillais en le faisant connaître à Paris.
    On ne peut évoquer le polar régional ou de terroir sans rendre hommage au Barcelonnais Manuel Varquèz Montalban et au Sicilien Andrea Camilleri. Ils ont fait rayonner le polar régional en trouvant des publics nationaux et internationaux.

    François Thomazeau déclarait à ce sujet : " Il existe un polar marseillais, comme il y a un polar new-yorkais (McBain, Kinky Friedman, Westlake...), un polar floridien (Willeford, Carl Hiaasen), un polar louisianais (Woodrell, Burke), un polar californien (quasiment tous les autres...) et la fameuse Ecole de Missoula. Tiens... Voilà une comparaison qui tient la route. Qu'ont en commun les écrivains de Missoula ? Ils se connaissent tous et picolent sec ? Alors il y a une école du polar marseillais. On se connaît et on aime le bon vin. Plus sérieusement, il est clair que personne ne s'est contacté, qu'on ne s'est pas réuni pour dire: lançons une école.... L'autre erreur est de penser que tout commence avec Izzo. Claude Klotz ( alias Patrick Cauvin) , Sébastien Japrisot sont marseillais. Celle qui a relancé le genre s'appelle Michèle Courbou (Les Chapacans) et Carrese a sorti Trois jours d'engatse avant Total Khéops. Mais, c'est sûr, c'est le succès d'Izzo qui a fait qu'on s'intéresse au polar marseillais et qu'on se rende compte qu'il y a une génération d'auteurs qui écrivent sur Marseille. "

    Nous avions consacré un article au polar marseillais en remontant plus loin jusqu’à Marius Pegomas , détective marseillais crée par Pierre Yrondy et aux polars régionaux de Jean Toussaint SAMAT.

    Et la Corse ?

    Extrait d’un de nos articles : " Dans une anthologie présentée par Roger Martin, on peut lire au sujet du genre policier comme étant universel : " Cette universalité –société, police, crime, nature humaine – permet d’avancer que le genre policier, qu’il soit français, anglais, espagnol, russe ou japonais, s’abreuve à des sources communes, auxquelles bien entendu, il convient d’ajouter celles propre au génie et à l’histoire de chaque peuple "

    Avant le western et le roman policier, c’était le roman d’aventure, de cape et d’épée, qui avait les faveurs du lectorat populaire. Un auteur corse y avait excellé avec son personnage du chevalier Pardaillan, il s’agit de Michel ZEVACO né à Ajaccio (1860), mort à Eaubonne (Val d'Oise, 1918). Militant, Zévaco se présente aux élections législatives de 1889, fonde des syndicats, et il sait se servir de sa plume pour faire passer ses idées (un article écrit contre le Ministre de l’Intérieur lui valut quatre mois de prison, séjour qui sera suivi d’un autre, pour raisons politiques également, quelques années plus tard). Sartre, qui le présente à plusieurs reprises comme l'un des auteurs qui ont le plus influencé sa carrière d'écrivain, le décrit comme un "auteur de génie [qui], sous l'influence de Hugo, avait inventé le roman de cape et d'épée républicain. Ses héros représentaient le peuple; ils faisaient et défaisaient les empires, prédisaient dès le XIVème siècle la Révolution française, protégeaient par bonté d'âme des rois enfants ou des rois fous contre leurs ministres, souffletaient les rois méchants" (Les mots). Pour Zévaco, l’Histoire semble souvent un moyen commode de critiquer les mœurs et la politique de son époque. Le personnage de Pardaillan en témoigne, qui affiche volontiers ses opinions républicaines et anticléricales., Il a été feuilletoniste au journal Le Matin à partir de 1906, avec Gaston Leroux (à qui l’on doit la série des Rouletabille, L’épouse du soleil ou le fameux Fantôme de l’opéra).

    En France, alors que le polar devient un genre littéraire répandu chez les lecteurs, les auteurs et les éditeurs, le polar reste cantonné longtemps dans la capitale ou bien à l’étranger car les éditeurs choisissent de traduire les grands auteurs anglo-saxons. Dans ce contexte jacobin, un Corse, José GIOVANNI, pourtant montagnard, va devenir un auteur et un cinéaste célèbre. Ancien taulard, il va exceller dans le genre.




    Zevaco et Giovanni ont écrit sans référence explicite à leurs origines insulaires. Nous nous plaisons à croire que, si la question leur avait été posée, ils auraient répondu, comme Jean-Toussaint Desanti, que, s’il n’avait jamais écrit en langue corse, ils avaient pratiqué la forme de pensée qu'exigeaient leurs origines.

    Des auteurs célèbres de Nouvelles, précurseurs du polar et du roman noir, se sont inspirés de la " légende noire de la criminalité insulaire ". Librio a publié un recueil où l’on retrouve Mérimée, Balzac, Flaubert, Saint Hilaire, Gaston Leroux en y associant deux auteurs corses : Pierre Bonardi et Jacques Mondoloni. À Pierre Bonardi, écrivain célèbre pendant l’entre deux guerres, on doit des récits de voyage, des enquêtes, des essais, des livres d'histoire et des romans... Jacques Mondoloni est l’auteur à succès de romans de science-fiction et de polars dont " Corsica Blues " paru en 1996.

    A la même époque, un pionnier de la Noire made in Corsica.- Paul-André Bungelmi crée la collection " Misteri " de l’Editeur Méditorial et publie d’excellents polars commis par des auteurs ayant pour la plupart fait leur chemin : Elisabeth Milleliri, Archange Morelli,Marie-Hélène Cottoni, Philippe Carrese et Philippe Thomazeau. Depuis lors, Paul-André Bungelmi a arrêté l'édition faute de moyens financiers et, aux dernière nouvelles données par Thomazeau, il tenait un bar de nuit extrêmement sympa à Ajaccio… " On amène sa bouffe, y a une cheminée au fond pour faire cuire le rata, et lui fait payer le vin. ". C’est sans doute, après l’édition, une façon de continuer un mode de vie fait d’échanges et de convivialité.

    Si quelques auteurs de polars corses ont été édités, il n’existait plus de série noire insulaire jusqu’en 2004. Des auteurs ont ouvert les portes des éditeurs insulaires comme Jean-Pierre Orsi d’abord aux Editions de la Marge puis aux Editions du Journal de la Corse. Depuis lors, son éditeur est le Journal de la Corse qui, si l’édition de polar est une nouveauté depuis 2004, reste le plus ancien journal insulaire (création en 1817). Saluons ce presque bicentenaire ( 200 ans dans 10 ans) de la presse qui a su entrer dans le 20ème puis dans le 21ème siècle grâce à ses générations succéssives de militants culturels. En 2004, un autre éditeur, les Editions Albiana, créait une collection " Nera " qui a publié plusieurs auteurs.

    Les thèmes imaginaires ou réels du polar existent dans la Corse noire et rouge sur fond de bleus marins et azuréens : la politique, les autonomistes, les barbouzes, les révoltes, la musique et les chants, l’écologie, la désertification, la pauvreté, le chômage, le huit clos, les mythes, les légendes, le banditisme… Il y a aussi les particularismes : l’omerta, l’honneur, la vendetta, le clan, le huis clos des îliens et l’ubiquité insulaire, la cursità (ce mal du pays qui rend l’exil douloureux, cette nostalgie bien particulière que l’on appelle, au Bresil et au Portugal, " Saudade ").… En Corse, le tragique côtoie cet humour malicieux et teinté de mélancolie, le " taroccu " si bien illustré notamment par le poète Simon Dary ( qui écrivait sous le pseudo de Simon d’Aullè). Souvent cet humour apparaît dans le polar corse.

    A l’initiative de Jean-Pierre Orsi, inventeur du commissaire Baptiste Agostini (héros d’une trilogie publiée avec succès mérité en Corse et sur le continent), des auteurs corses de polars ont décidé de se réunir de façon associative. Il ne s’agit ni d’école ni d’académisme, mais plutôt de mettre le polar dans le bouillon de culture corse avec ses polyphonies. Ils espèrent un " chjam’e risponde " avec le auteurs venant des quatre horizons méditerranéens.
    Jean-Pierre Orsi, connaisseur de l’Histoire de la Corse mais aussi des îles voisines, écrit des polars ancrés dans le contemporain insulaire. Lorsqu’il parle de choses sérieuses, c’est sans se prendre au sérieux, ce qui n’enlève rien au poids des mots sur les grands et petits maux de la société des îliens. Jean Crozier-Pandolfi a été le premier à le rejoindre en mettant à la disposition du groupe ses compétences journalistiques et informatiques pour créer et animer le site de corsicapolar. Il est l’auteur de la Vendetta de Sherlock Holmes, un passionnant pastiche avec des intertextes savoureux qui témoignent d’une solide culture littéraire mais aussi d’une grande finesse d’esprit digne du fameux détective.

    Cette année , la bibliothèque de prêt de la Corse du sud a organisé un événement sur le Polar dans le monde. Nous en profitons pour féliciter les organisatrices de cet événement qui ont fait la promotion du polar dans le cadre du développement de la lecture en milieu rural.

    De nouveaux auteurs corses apparaissent et les ouvrages publiés en Corse s’ajoutent et se multiplient. En silence et malgré le manque de véritable promotion, le polar corse s’est installé durablement dans et hors de l’île déjà riche dans tous les autres genres littéraires. L’âme enracinée dans leur île, les auteurs corses de polars veulent parler au monde. Arpenteurs du réel ou écrivains de pures fictions, ils prennent place, avec un premier festival insulaire, aux côtés des autres polardeux qui ont émergé sur les îles et le littoral méditerranéens.









    L’association Corsicapolar organise le premier grand festival de polar corse et méditerranéen à Aiacciu (Ajaccio) du 6 au 8 juillet 2007 sur la grande place Foch, face à l’entrée principale de la Mairie. En juillet prochain, des auteurs corses de polars ont invité d’autres auteurs méditerranéens. En partenariat avec la SNCM, des dédicaces auront d’abord lieu sur le car-ferry Napoléon qui fera la traversée Marseille- Ajaccio dans la nuit du 5 au 6 juillet 2007. A partir du vendredi 6 juillet jusqu’au dimanche 8 juillet 2007, le festival se déroulera place Foch, appelée aussi Place des Palmiers, au fond de laquelle, dominant la fontaine aux quatre lions de granit, se dresse la statue de Bonaparte en premier consul.

     ( dessin Cagnat pour Corsicapolar)
    Sous le regard de Bonaparte en marbre blanc, se réuniront des auteurs du genre noir. Seront présents : Alexandre Dominati , Arlette Shleifer , Bernard Oustriéres, Catherine Fradier , Daniele Piani , Francis Zamponi , Gianni Biondillo, Gildas Girodeau , Gilles Del Pappas , Giorgio Todde, Giulio Angioni, Jean-Claude Di Ruocco, Jean-Paul Ceccaldi, Jean-Paul Delfino , Jean-Pierre Larminier , Jean-Pierre Orsi , Jean-Pierre Petit , Jean-Pierre Santini , Luca Crovi, Marie-Héléne Ferrari , Maurice Gouiran , Okuba Kentaro , Olivier Collard , Paul Milleliri , Pierre Lepidi , René Fregni , Serge Scotto, et Ugo Pandolfi. Telle est donc la liste provisoire des auteurs qui ont d'ores et déjà convenu de se retrouver à Ajaccio, Corse du sud, du 6 au 8 juillet prochain dans le cadre du premier festival du polar corse et méditerranéen.


    A Ajaccio, aux côtés du polar corse, seront présents le polar marseillais, le polar provençal, le polar Catalan , le polar sarde, le polar milanais… Chaque diversité contient sa part d’universalité, sans vouloir enfermer toute particularité dans l’universel et, a contrario, toute différence dans l’identité. Ce sera aussi l’occasion de rencontrer des auteurs affirmant et assumant leurs origines sans rejet de l’autre. Sans nombrilisme et sans tabou, ils écrivent des fictions contemporaines qui peuvent même donner à penser. Ils existent grâce à des éditeurs régionaux qui vont au delà de l’aspect commercial des choses en s’investissant pleinement dans la mission culturelle qui est l’honneur de cette belle profession. Sans leur intelligence et leur travail, la littérature corse n’aurait jamais eu l’essor qu’elle connaît depuis quelques années.

    Soyez nombreux à venir au rendez-vous ! Vous y rencontrerez les auteurs et y trouverez votre ou vos polars de l’été!



    Corsicapolar...
    avait lancé un concours d'affiches et les propositions ont été nombreuses. Nous en reproduisons quelques unes:



    A SUIVRE....


    Yahoo!

  • Le théâtre ferroviaire de la Gare franche à Marseille : Une invitation au voyage dans l'imaginaire.

    Implantée dans le quinzième arrondissement de Marseille, la Gare Franche se trouve à la charnière de Saint Antoine et du Plan d’Aou, dans la zone franche, entre les entrepôts de L’Univers du Sommeil, ceux du Dock des Alcools et la ligne de chemin de fer. Le site est composé d’une usine, d’une maison et d’un terrain. Grâce au soutien de ses partenaires, la Ville de Marseille, le Ministère de la Culture et le Conseil Régional, le Cosmos Kolej a pu faire, en 2003, l’acquisition du site et travaille aujourd’hui à sa modification architecturale. La Compagnie poursuit sa recherche artistique et l’expérimentation de nouvelles formes dans cet espace permanent. Après avoir demandé asile aux théâtres pendant une quinzaine d’années, le Cosmos Kolej ouvre également la Gare Franche à d’autres équipes artistiques, de France ou d’ailleurs. Il invite et accompagne artistes, compagnies et collectifs, dans leurs démarches artistiques, du théâtre au cinéma, des arts plastiques à la musique. À Saint Antoine, la Gare Franche doit être le lieu de toutes les rencontres : à la buvette, ouverte à tous et en permanence, dans le centre ressources, dans la cour ou dans l’usine, se déclinent et se travaillent les projets artistiques. Il s’agit de croiser les publics, de diversifier les rencontres, d’aménager les contacts, de contribuer au lien social. Un centre international de projets artistiques doit se développer sur le site qui accueille déjà des activités de jardinage liées à des expérimentations théâtrales pour les habitants du quartier, de cinéma et une école nomade de théâtre, reflétant l'univers singulier du Cosmos Kolej.


    " Avec l’installation du Cosmos Kolej à la Gare Franche, Wladyslaw Znorko a engagé son exploration de Marseille, par le nord. Depuis 2001, il " marche " la géographie de Saint Antoine et du Plan d’Aou. Au fil des rencontres, il tisse une conversation avec les habitants, instille sa part d’imaginaire, tente de modifier ce qu’il est pourtant convenu de nommer vérité, troublant l’ordre normal des choses. Il envisage ensemble la maison et le monde, dans un aller et retour constitutif de la Gare Franche ".





    Nous avons assisté à la représentation théâtrale de samedi dernier (26 mai) et nous avons pu découvrir la Gare franche, une usine désaffectée qui fabriquait des fûts métalliques et jusqu’où des trains de marchandises venaient. Wladyslaw Znorko et les artistes, qui l’accompagnent dans son aventure marseillaise, ont déjà donné une seconde vie à ce sanctuaire habité par des ombres mortes et fait de ce lieu une gare culturelle pour voyager, ouvrir de nouvelles voies et découvrir. C’est un lieu de rencontre entre les artistes et un public venant de tous les ailleurs. Dans ce public, les habitants du plan d’Aou et de Saint Antoine se retrouvent avec ceux d’ailleurs dans une ambiance conviviale. Parmi eux, de jeunes gens des cités HLM découvrent le plaisir du théâtre et des moins jeunes d’ailleurs celui de converser avec eux.

    LES BOUTIQUES DE CANNELLE
    de Wladyslaw Znorko
    d’après l’œuvre de Bruno Schulz

    Distribution :

    Scénographie
    Wladyslaw Znorko,
    assisté d'Espace et Cie
    Univers Sonore
    Olivier Martin
    Lumière
    Richard Psourtseff
    Maître de plateau
    Raphael Odin
    Comédiens :
    Antonella Amirante
    David Bursztein
    Henri Devier
    Elisabeth Ernoult
    Jean Pierre Hollebecq
    Bruno La Brasca
    Irina Vavilova

    Dernière création du Cosmos Kolej, présentée pour la première fois au public marseillais après une tournée internationale. En coulisse, une soupe mijote pour être partagée à l’issue de la représentation.

    Le spectacle est rodé par des tournées en France, en République tchèque, en Sibérie et en Russie. Sur scène, les acteurs ont montré leur talent en donnant chair à des personnages dans une pièce difficile. Le décor est onirique : des voilages blanc vaporeux sur les côtés et au fond une petite maison. C’est par les voilages qu’entrent les personnages. Les deux premiers sont un couple, la femme tire le mari par la main. Elle a mis une belle robe et un beau chapeau et lui a un smoking et haut de forme… Quelque chose cloche déjà : l’homme est en caleçon et n’a donc pas de pantalon … pire : son épouse lui rappelle qu’il est mort. Ces détails ne les empêchent pas d’aller au spectacle avec leur fils qui apparaît en adulte empoté et empêtré dans des monologues intérieurs. Le père a oublié son porte-monnaie et charge alors son fils d’aller le chercher à leur domicile… Le fils nous entraîne dans son errance. Dans un style fait de baroque et de lyrisme, l’auteur pousse à la rêverie, ce vagabondage de l’esprit. Les personnages folklos et les moments de déjantes font penser au cinéma d’Emir Kusturica. L’histoire simple du début ouvre des fissures, des voies d’errance comme des voies d’eau dans la coque du récit. Les personnages morts ou vivants portent des étiquettes à leurs vêtements. Ils se disputent entre deux poses pour des photos. Les voilages s’ouvrent dès la moindre brise, une tempête se lève dans la ville où tout bascule dans le fantasme sous le regard du fils qui déambule dans ce qui apparaît comme un rêve, un espace de liberté. A chacun d’entrer dans cet espace et de se laisser porter par les voilages vaporeux de l’imaginaire. C’est une invitation à l’émancipation et à la découverte de l’infini. La vocation du poète n’est-elle pas de délivrer la grammaire de la logique ? Dans les quatre pages du Journal La Friche de la Belle de mai consacrées à la Gare Franche, nous avons relevé une citation sur le théâtre de Shulz : Ektarina Bogopolka – La pensée russe- janvier 2006 : " Il y règne la liberté d’improvisation d’un théâtre de foire qui échappe à la logique cartésienne pour se placer sous le signe d’une vérité éphémère, vue à travers le prisme des rêves étranges et excentriques d’un poète. "

    "Ce n’est pas sans raison que ces rêves d’antan reviennent aujourd’hui. Aucun rêve, si absurde soit-il, ne se perd dans l’univers. Il y a en lui une faim de réalité, une aspiration qui engage la réalité, qui grandit et devient une reconnaissance de dette demandant à être payée." (Extrait de "La république des rêves" de Bruno Schulz)

    Le grand poète polonais Cezslav MILOSZ avait un projet : "poétiser la réalité ". Il était en quête du mystère de l’existence. Si, poète maudit, il a percé ce mystère, il ne l’a pas divulgué avant de mourir. C’est par " La pensée captive ", qu’il est connu du lectorat occidental en 1953. Cezslav Milosz, né en 1911, est mort le 14 août 2004 à Cracovie, à l’âge de 93 ans Avec le théâtre de Schulz, Wladyslav Znorko poétise la réalité pour libérer la pensée. " Wladyslaw Znorko est porté par ce que d’aucun appelle l’âme slave, cette capacité à relier mémoire et imaginaire dans une quête des origines qui resterait sans doute toujours un peu nostalgique, mais extrêmement accueillante. " Ecrit Fred Kahn dans le journal de la Friche de la Belle de Mai.
    La Pologne est aussi le pays de Wiltold Gombrowicz, l’auteur de " Cosmos " (comme Cosmos Kolej), " Trans-Atlantique ", " Pornographie "… Le philosophe aimait à dire de lui-même : " Je suis un humoriste, un pitre, un équilibriste... " et de nous tous : " L’homme est un éternel acteur... ". Sans doute le penseur a-t-il rencontré le poète. Tout n’a pas été dit et tant reste à imaginer… Gombrowicz a toujours dénoncé la routine et la paresse intellectuelle. Pour mieux comprendre Bruno Schulz et Wladyslaw Znorko, sans doute faut-il connaître ses amis Tadeusz Kantor, Wiltold Gombrowicz et Stanislas Ignacy Witkievicz. On peut aussi entrer dans cette pièce expressionniste sans autre référence que soi-même, à condition de dépasser les limites de la raison et de traverser les voilages vaporeux qui ouvrent sur l’imaginaire. Il ne s’agit pas de comprendre mais de ressentir. Alors, bouleversé de bonheur, vous partagerez ce moment d’errance et de liberté. Plus tard, les bribes se mettront en place révélant toute la richesse de cette œuvre profondément humaine, avec l’envie d’en savoir plus sur la vie de Bruno Schulz, (12 juillet 1892 - 19 novembre 1942) – écrivain, dessinateur, graphiste et critique littéraire.

    "C'est en 1933 que Schulz commence à publier ses œuvres. Grâce à l'aide de Zofia Nałkowska il publie Sklepy cynamonowe (Les boutiques de cannelle). En 1936, il publie Sanatorium pod klepsydrą (Le sanatorium au croque-mort). Avec l'avènement de la Seconde Guerre mondiale, Drohobycz est occupée par l'Union soviétique, puis par l'Allemagne nazie suite à l'Opération Barberousse. En 1941-1942, Bruno Schulz est contraint de vivre dans le ghetto de Drohobycz. Il est alors sous la "protection" de l'officier de Gestapo Felisk Landau qui lui fait réaliser des peintures sur papier. Schulz est tué au croisement des rues Mickiewicz et Czacki le jeudi 19 novembre 1942. L'œuvre de Schulz se rapproche de l'expressionnisme moderne de Franz Kafka tout comme du surréalisme, du créationnisme et de la psychanalyse. Bruno Schulz lui-même appréciait grandement les œuvres de Rainer Maria Rilke, Franz Kafka et Thomas Mann." Source : Wikipédia – article à l’adresse :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Bruno_Schulz

    " Comment découvrir la porte d'entrée des êtres et des choses ? Comment accéder à l'autre, à tout ce qui n'est pas moi, à tout ce qui m'échappe et m'abandonne à la solitude ? Oui, je vais perdre ceux que j'aime. Oui, je vais mourir. Mais à cette certitude s'ajoute une grâce ou une énigme. Il existe des instants, des lieux à mi-chemin entre monde visible et monde invisible où le temps se suspend, où la dimension de l'un et de l'autre donne accès à une vérité plus belle et plus vraie. Seules ces rencontres inestimables avec l'autre nous aident à saisir le fait même de voir ou de penser…. " extrait de la présentation du livre de Cyntia Fleury " La métaphysique de l’imagination " (voir notre article du 19 mai 2007).

    La pièce " Les boutiques de cannelle " peut apparaître comme hermétique à un public qui ne connaît pas l’histoire de la Pologne et ignore tout de la culture juive polonaise. Il suffit pourtant de comprendre qu’il faut " se faire des songes " (pour reprendre une expression de Pagnol au sujet du public qui vient au théâtre) et les acteurs excellents vous aident en cela. Selon Mauriac, " Il n’y a pas de théâtre sans incarnation ". Les personnages prennent chair grâce aux acteurs qui nous permettent de rompre les amarres avec la vie réelle pour une errance dans ce " rêve incarné ", antinomie qui s’applique à la pièce de Bruno Schulz mais aussi à tout le théâtre et au-delà peut-être à la vie elle-même.

    Après la représentation de la pièce " Le traité des Manequins " en 1997, Gabriel Gabin dans le mensuel grattuit …491 : " … Il faut regarder, sentir, se balader autour, écouter le silence et les bruits, se laisser séduire -ou pas-. Dans ce monde déchiré, entre réel et imaginaire, il faut essayer de s'abandonner sans préjugés et sans résistances mentales à son plus primal plaisir. Ici, on est obligé de transgresser le système de critiques traditionnellement utilisé au théâtre : la qualité du texte, le jeu des acteurs, l'efficacité de la mise en scène ? Ce schéma d'analyse presque binaire n'a plus lieu d'être dans l'espace Znorko : il faut oublier et lâcher prise pour découvrir de nouvelles sensations. Le beau ne suffit pas à tout le monde, mais il faut connaître Wladyslaw Znorko et le regarder -libéré de toutes entraves- projeter son esprit prolixe. On aimerait qu'il nous jette parfois quelques passerelles, mais celui-là invente un théâtre qui ne laisse personne indifférent. Lui. " Pour lire l’article, aller à l’adresse :
    http://www.491.fr/Archives%2097/Znorko.html

    Les littéraires trouveront à l’auteur des parentés : Nerval, Proust, Beckett, Artaud, Brecht, Cocteau... Mais il s’agit de Bruno Schulz sans autre référence que lui-même avec, pour seules limites, sa forme et son antiforme pour reprendre l’expression de Gombrowicz. L’antiforme Grombrowiczienne est une forme qui libère en s’opposant à la tyrannie du moule social et psychologique imposé à notre immaturité. C’est le refus de l’enfermement et le choix de chercher librement " quelque chose de plus ample et supérieur ". Le rêve conçu comme clé des régions inconnues de l'âme, comme voie d'accès à une réalité supérieure… L’explication est lapidaire mais veut simplement suggérer l’état d’esprit que nécessite, à nos yeux, la jouissance de ce spectacle qui participe à la réhabilitation de l’imaginaire. Il serait dommages de passer à côté de cet encouragement à dépasser Descartes. C’est l’occasion de ne pas laisser la raison mettre des limites à votre pensée et de débrider votre imagination créative. Le rêve a d’autre rôle que celui de gardien de votre sommeil. Bruno Schulz a écrit un rêve éveillé et Wladyslav Znorko le propose comme un éveil au rêve, cet espace infini peuplé d’étoiles. Il faut savoir d’abord renoncer à la boussole, à la montre et aux autoroutes pour faire le choix de l’errance. On a alors la possibilité " de découvrir la porte d’entrée des êtres et des choses dans des instants, des lieux à mi-chemin entre monde visible et monde invisible où le temps se suspend, où la dimension de l’un et l’autre donne accès à une vérité plus belle et plus vraie... ".

    L’ambiance sonore et les éclairages participent pleinement à la mise en scène. Bravo donc aux artistes des coulisses pour le concert de sons et lumières si justement partitionnés. Après le spectacle, la soupe offerte était " à l’oignon ". Les comédiens viennent vous la servir en donnant à chacun l’occasion de converser avec eux. C’est un personnage habillé en tenue d’uniforme militaire qui m’a servi dans une gamelle de soldat. Dans la pièce, il faisait des apparitions avec une arme. Cette présence, muette et menaçante dans le rêve du héros, est peut-être annonciatrice d’un cauchemar à venir puisque, dans la réalité postérieure à la pièce, l’auteur a été abattu par un SS.





    " Une pièce de théâtre ne m’intéresse que si l’action extérieure réduite à la plus grande simplicité n’est qu’un prétexte à l’exploration de l’homme " disait Montherlant. Et Wladyslas Znorko ajoute :
    "Les histoires les plus simples font les plus beaux ouvrages. Dans le cas des Boutiques de Cannelle, je parlerai même de simplicité enfantine. Ecoutez voir : dans une obscure ville de province en Pologne, un couple de commerçants s’endimanche pour aller au théâtre ; occasion aussi de sortir leur fils un peu empoté. Un point c’est tout. Comment faire plus simple ? Cette histoire, cependant, se pimente un peu car le père est mort depuis longtemps et en plus de ce désagrément, il a oublié son porte-monnaie à la boutique. Afin d’honorer le prix du vestiaire et la buvette de l’entracte, il demande à son fils, avant le lever de rideau, de courir à la maison chercher les sous. Le fiston s’exécute avec joie et galope dans les ruelles qu’il connaît par cœur. Pour gagner du temps il prend des raccourcis en passant par des boutiques vieillottes, des arrière-cours et des chemins de traverse. Mais tout est en désordre : les rues ont changé de place et les places sont désormais des rues. Il en oubliera sa mission, émerveillé par cette soudaine liberté, bouleversé par ce ciel étoilé qui, peu à peu, va se transformer en une belle aube d’ambre. Il va vivre ce que nous avons tous vécu un jour : Un instant de grâce où nous ne regardons plus le nom des rues, mais les minuscules failles des murs où se reflète en paillette, l’or du futur. C’est tout. C’est simple. Pourtant l’univers vous tombe sur la tête." - Wladyslaw Znorko. St Antoine . A l’aube.-


    Présentation de l’auteur Bruno Schulz : Né en Galicie autrichienne en 1892. Il est devenu polonais par le rattachement à la Pologne de sa ville natale, Drohobycz, après 1918. Tôt attiré par la peinture, il devait, toute sa vie enseigner le dessin dans le bourg même où il avait ses attaches et où son père, Jacob Schulz, tenait boutique de marchand de papier. Il est venu à la littérature par hasard : sous forme de lettres qu'il envoyait à un ami pour le mettre au courant, sur un mode très inattendu de sa vie solitaire, des faits et gestes de ses proches et concitoyens, des menus événements de sa bourgade. Les lettres s'organisèrent bientôt en récits : ainsi parurent en 1934 Les Boutiques de Cannelle et trois ans plus tard Le Sanatorium au croque-mort. Il introduira Kafka en Pologne en 1936 en traduisant Le Procès. Du reste, par ses origines juives, sa culture, son humour, son existence effacée, il est souvent comparé au Praguois dont le sépare cependant un art tout différent : un art sensualiste, une exubérance verbale dont la somptuosité baroque reste toujours remarquablement maîtrisée. Il commence un roman qui sera, hélas, définitivement perdu dans les ruines du ghetto. Il a été tué d'un coup de revolver dans la nuque par un SS en 1942, Feliks Landau.
    Schulz n’est pas un écrivain. Ce n’est pas non plus un prof de dessin comme il est dit dans les biographies officielles. C’est un prof de travaux manuels de collège, dans une obscure ville des confins orientaux. Une petite ville où rien ne se passe. Pourtant, lui, est quelqu’un d’extrêmement sensible et tourmenté. C’est quelqu’un d’émacié avec un regard de fou. Du même genre que celui d’Artaud. Il dessine seul, le soir, dans son atelier et de sa plume naît quelque chose d’incroyable. D’ailleurs, Vialatte disait que ses dessins et ses récits, c’était comme "si on retrouvait un pot de chambre en émail noyé dans une mare et qui aurait pris l’apparence du porphyre." (Wladyslaw Znorko)

    Isaac Bashevis Singer dira plus tard : " Parfois il écrivait comme Kafka, parfois comme Proust, et il a fini par atteindre des profondeurs auxquelles ni l’un ni l’autre n’avaient accédé ".

    Bibliographie sommaire : Les Boutiques de cannelle, Denoël, 1983, Le Sanatorium au croque-mort, Denoël, 1983, Correspondances, Denoël, 1991, Bruno Schulz. Œuvres complètes. Collection " Des heures durant... ", Denoël, 2004, Bruno Schulz. Le Livre idolâtre. Albums et Beaux Livres, Denoël, 2004, Bruno Schulz. Œuvres complètes. Collection " Des heures durant... ", Denoël, 2004



    Pour plus aller sur le site de Cosmos Kolej à l’adresse ci-dessous :
    http://www.cosmoskolej.org/
    et les photos du spectacle :
    http://www.cosmoskolej.org/creation/cannelles/can_photos.html
    Dossier complet établi par le journal de la Friche de la Belle de Mai à l’adresse ci-dessous :
    http://www.lafriche.org/friche/zdyn1/rubrique.php3?id_rubrique=351
    Site sur Bruno Schulz :
    http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/schulz/schulzbruno.html

    Sur le théâtre polonais : Lecture d'une œuvre : Kordian de Slowacki (PDF) à l’adresse ci-dessous :
    http://www.edutemps.fr/extrait/EX2kord.pdf



    Quelques articles de presse :

    - Des morts-vivants plutôt hilares -Le Cosmos Kolej de Wladyslaw Znorko joue une pièce de Bruno Schulz, les Boutiques de cannelle - " N’oublie pas que tu es mort ", glisse du coude la mère, à Jacob son mari, pourtant hilare. Déjà mort, comme elle, mais bien vivant sur scène. Il s’agit moins d’un emprunt à Tadeusz Kantor qu’à Bruno Schulz. Lui aussi Polonais, auteur des Boutiques de cannelle, nouvelle dont est tirée cette pièce éponyme créée par le Cosmos Kolej aux Subsistances à Lyon. Puis présentée au Glob à Bordeaux, dans le cadre de Novart. " Les Boutiques de cannelle donnent une certaine recette de la réalité. Sa substance est en état de fermentation incessante, de germination, de vie secrète. Il n’y a pas d’objets morts, durs, limités ", pensait Schulz. Et au-delà l’idée que " la réalité prend certaines formes seulement pour l’apparence ". Ce dont on peut jouer au théâtre. Comme le fait Wladyslaw Znorko, avec gourmandise (...) -Hugo LATTARD, L’humanité.

    - Théâtre. Les voilages qui ondulent comme vagues frémissantes. Le bois brut, presque gris d'avoir trop vécu. Une maison, une armoire. Une fenêtre. Dedans-dehors, ici, cette distinction n'a pas lieu d'être. Une femme un peu ronde et un homme assez maigre, jambes nues sous la jaquette de son habit... Bruit incessant des sabots des chevaux sur le pavé. Lumières qui changent. Apparition d'autres personnages. Retrouvant l'univers de Bruno Schulz qu'il aime profondément et connaît, Wladyslaw Znorko propose, après Le Traité des mannequins, une adaptation des Boutiques de cannelle, premier des textes publiés par l'écrivain de Drohobycz (Galicie autrichienne lorsqu'il naît, en 1892, Pologne après 1918). L'écriture remonte aux années trente (...) Armelle HÉLIOT- Le Figaro

    - Dans le dédale des souvenirs d'enfance. On est un peu désarçonné au début par cet assemblage hétéroclite et bizarre de scènes de rues, qui s'enchaînent en désordre. Et puis, on se laisse tout doucement happer par la magie de ces tableaux, accrochés entre rêve et réalité sur le mur des souvenirs d'enfance. La mise en scène de Znorko restitue à merveille l'univers de Bruno Schulz. Pierre BIGOT – Ouest France



    Encore du Théâtre :


    Les 13Paniers -Festival de Théâtres Forains

    Pour la deuxième année consécutive à Marseille, le théâtre forain investit le quartier historique du Panier à l’occasion du festival des 13Paniers.

    Du 30 Mai au 11 Juin 2007 " Tiens, voilà les comédiens... ! " Musiciens, chanteurs, clowns, conteurs… envahissent le vieux quartier marseillais.

    Sur la place de la Cathédrale de la Major, tout près de la Méditerranée, place à 13 jours de théâtre, de rencontres, de cinéma, d’échanges, de musiques, de réflexions, d’initiatives culturelles, de partage et de découvertes… dans deux théâtres insolites : la Posada et Le Théâtre Volant.

    Le nouveau rendez-vous artistique et culturel de Marseille est un rendez-vous de théâtres populaires hérités du théâtre de foire dans une ambiance conviviale et festive. Un programme qui associe tradition artistique et modernité, poésie et jubilation comique ! Ce week end, véritable creuset des arts forains, s’inscrit dans la démarche de rencontres des compagnies itinérantes soutenues par le CITI (Centre International pour le Théâtre Itinérant). Cabaret, clowns, mimes, contes, opérette, Commedia Dell’Arte : le public pourra apprécier toutes les dimensions du théâtre forain. Parmi les pièces de cette édition, on trouve : Scaramuccia l’européen et Un de la Canebière (les Carboni), Cité H (la Compagnie du Mystère Bouffe), l’Incroyable Fanfare (les PIle ou Versa), ou encore Les poules auront des dents (Le Théâtre du Maquis).
    " Nous voulons faire des 13Paniers un festival de théâtre convivial et tous publics, rendre le spectateur heureux, l’impressionner, l’émouvoir, sans barrière d’âge ou d’origine sociale ", déclare Fred Muhl, directeur artistique du Festival.


    Yahoo!

  • A Marseille, il ne faut pas confondre " boucan " et " Boucain ". Le " boucan " est celui ou celle qui ne peut vous attirer que des ennuis, c’est-à-dire celui ou celle qui vous emboucane … vous pourrit la vie… alors que le Boucain est l’habitant de la petite cité de Bouc bel air, à une poignée de kilomètres de Marseille.

    Michel Jacquet est un Boucain qui écrit des bouquins dans lesquels on peut éventuellement rencontrer des boucans.

    Les trois romans précédents:




    Nous avions déjà évoqué dans un précédent article ses ouvrages, " La rouste " et " Le Nervi ". Nous avions annoncé la prochaine parution d’une suite.
                                  L’auteur l’a écrite : " Label flic ".
    Le Nervi a le label d’une qualité juridique que, retraité, il n’exerce plus officiellement. C’est aussi une étiquette collée à vie, presque comme une seconde peau. Chez le Nervi, c’est devenu un label indépendant et une appellation d’origine incontrôlable. Si son activité principale est devenue la sculpture sur bois d’olivier et la vente sur les marchés, Raymond Garcia reste le Nervi pour ses anciens collègues et quelques gros bonnets de la pègre locale… La retraite en a fait un électron libre et ses seuls liens sont ceux de l’amitié, parfois l'amour...

    Rappel : " Le Nervi, monsieur, c’est le surnom que mes amis m’ont donné pendant une trentaine d’années. Chez nous, en Provence, nous appelons comme cela les hommes forts, très musclés. Mais aussi les hommes qui aimaient, à l’époque, traîner autour du port à l’affût du moindre coup foireux. Et enfin, ceux qui aimaient le contact physique avec d’autres marlous… "
    Nous ajouterons, mais ce n’est pas le cas de notre héros, que, dans le reste de la France et selon le petit Robert (l’indic de La rousse), un nervi est aussi un portefaix, un tueur, un homme de main. Si notre Nervi est un homme de main, il s’agit de la main de la Justice dont on sait qu’elle peut être immanente. Si on évoque la morale, celle du Nervi n’est pas kantienne et il n’a pas l’intention de se couper les mains pour les garder propres. Ses mains lui servent à créer mais aussi à boxer ou appuyer sur la détente. Ancien flic de la Criminelle, Raymond Garcia, alias Le Nervi, est installé dans sa retraite et la soixantaine passée. Avec ses mains de cogneur, il sculpte, dans le bois d’olivier et le cep de vigne, des objets qu’il vend sur un marché de Provence.






    Les premières lignes de Label flic :

    " HEUREUSE ET DÉTENDUE, SOPHIE SOURIAIT À PLEINES dents. La jeune femme brune, âgée d'une vingtaine d'années, pressentait que ce soir elle arriverait enfin à obliger le tas de muscles qui se trouvait face à elle à se dévoiler. Elle le connaissait depuis plus d'un an mais ignorait presque tout de sa vie antérieure.
    Raymond, solitaire par nature, n'aimait guère se laisser aller à des confidences intimes. Ce retraité de la police, reconverti dans la fabrication d'objets hétéroclites en bois d'olivier, vendait son produit sur les marchés de Provence. Tous d'eux s'étaient d'ailleurs connus lors d'un déballage, côte à côte à Gardanne, un dimanche matin. Depuis, ils ne s'étaient plus quittés. Chacun habitait chez soi mais il n'était pas rare que Sophie vienne passer une nuit ou quelques jours chez son ami. Presque quarante ans les séparaient, mais ils n'y attachaient aucune importance. Ils avaient trouvé en l'autre ce qui leur manquait, lui une fille, elle un père. C'est du moins comme cela qu'ils se plaisaient à définir leur relation.
    La gamine avait fait un véritable forcing. Quelques bûches enflammées dans l'âtre de la cheminée, une lumière douce distillée par une lampe de salon déposée à même le sol et un excellent château-simone rouge, un coteau d'Aix-en-Provence de bonne qualité, généraient une ambiance très agréable, propice à quelques confessions.
    Le fort mistral qui soufflait depuis plusieurs jours apportait un bruit de fond naturel, une musique presque sifflante, envoûtante. Tous les ingrédients réunis pour que l'on se sente bien à l'intérieur de ce mas, en ce mois d'octobre, à proximité du village de Fuveau.
    Sans même s'en rendre compte, le Nervi, petit à petit, s'était laissé séduire par l'atmosphère. Sophie, assise à ses pieds sur le tapis qui trônait au milieu de la pièce, posa sa tête sur les genoux de l'homme. Lui, naturellement, caressa les cheveux de la gamine. Il était conquis, charmé.
    Elle voulut lui demander : "Dessine-moi un mouton !" L'idée l'amusa et faillit la faire rire mais la jeune femme se ravisa.
    - Parle-moi de toi, parle-moi d'avant, quand tu étais jeune, un "minot" comme vous dites ici.
    Il ferma les paupières et but une gorgée de vin. Il garda en bouche le précieux liquide quelques instants. Il comprit, à ce moment précis, que le piège s'était refermé sur lui et qu'il ne pouvait échapper à un interrogatoire en règle. "

    Dans Label flic, le Nervi se dévoile davantage. Sur les marchés de Provence, il a connu Sophie. Quarante ans les séparent et ils se sont liés d’un amour platonique. Un feu de cheminée, quelques verres de rouge château Simone (un vin des coteaux d’Aix-en-Provence un peu cher mais excellent), un léger mistral, la tête de Sophie reposant sur ses genoux, le Nervi se laisse aller à quelques confidences intimes : Son amour pour son grand-père Gustave, son célibat, son surnom de Nervi qui impressionne les voyous… Trois premières pages de quiétude et de souvenirs, puis nous laissons un temps le Nervi à ses rêves d’enfance et entrons dans les arcanes de l’Evêché. Ce nom est communément donné à l’hôtel de police de Marseille dont la moitié ancienne était habitée jadis par l’épiscopat marseillais et cachait des ramifications souterraines la reliant à la cathédrale de la Majore. Seul le nom " Evêché " a survécu à la sécularisation des lieux devenus le confessionnal des malfrats et l’antichambre des geôles de la République. Et puis, les bons policiers y entretiennent leur foi tandis que certains " éméchés ", comme un certain Lucien Grammier, y détruisent leur foie.

    Dans un bureau de la brigade des Stupéfiants, un Junky (un type qui vendrait sa mère pour se procurer une dose de drogue) balance son dealer qui, peu de temps après, est retrouvé mort, tué presque sous les yeux de deux flics qui surveillaient son domicile… C’est le début d’une série de meurtres… Le trio des tueurs (deux hommes et une femme) utilisent des tenues d’uniforme de la police nationale. L’arme utilisée est un stylet, " ce fameux couteau corse à lame très fine ". Un flic alcoolique, ami du Nervi, s’intéresse à l’affaire puis devient le principal suspect ; " Trompe la mort " devenu " Bois sans soif ", policier à la dérive, se réfugie chez le Nervi. Pour tirer l’affaire au clair, le retraité va devoir abandonner provisoirement la réalisation et la vente des sculptures en bois d’olivier sur les marchés… Il s’la donne à donf ! Alors, mèfi ! Pour cela, il fait appel à ses deux vieux coéquipiers qui ressemblent à ceux du célèbre San Antonio : le Mammouth ressemble fort à Béru et le Criquet à Pinaud. ( Nous voulons parler de Alexandre-Benoît Bérurier, dit Béru, qui est un véritable porc, une armoire à glace plus douée pour la castagne que pour la finesse, mais aussi un excellent professionnel. Pinaud, dit Pinuche ou Débris, est un policier radoteur à l'allure de vieillard à moitié sénile, à se demander pourquoi il n'est pas à la retraite depuis longtemps. Mais cette apparence cache un policier hors pair).

    Label Flic est aussi une histoire d’amitié et de trahison au sein même de la police. Michel Jacquet met en scène des flics anciens dont les vies ont ou auraient pu basculer du mauvais côté. Entre générations de policiers, les méthodes ne sont pas les mêmes mais il existe tout de même une filiation. Lors du repas annuel des anciens, ce sont le Mammouth, le Criquet, le Marquis, l’Estrasse, le Chamois, le Cube, Tête plate, le Gitan et autres vieux poulets qui répondent présents.

    Le Nervi est un ancien qui enquête à l’ancienne. Le droit à l’erreur et la fin qui justifie les moyens sont ses seules règles face à des truands sans foi ni loi. Avec Mammouth et le Criquet, il forme un trio opérationnel de choc. L’intrigue se dénoue dans la pègre locale où évolue une mystérieuse femme… Le Nervi sera-t-il à la hauteur de sa réputation ? A vous de le découvrir.

    Un auteur italien très connu, Andréa G. Pinketts a dédicacé " Label flic " et il écrit : " Ce n’est pas par hasard que Label flic " commence par un rapprochement amoureux et qu’il se termine avec la douloureuse et tendre conscience d’un homme dur, câliné par son grand-père et en dérive avec la vie, substantiellement un flic qui investigue sur ce qui, au fond, reste ; l’amitié. Et alors, je peux absolument confirmer que Michel, Raymond, appelé le Nervi, a beaucoup d’amis outre Mammouth et Criquet, mythologiques dans leur essentialité. C’est moi le nouvel ami. "

    Le prochain livre de Michel Jacquet est déjà en gestation. Au départ, il devait avoir pour héroïne une "cagole" de la Belle de Mai mêlée à une intrigue... policière bien sûr. Pour ceux qui ne le savent pas, " cagole " vient du vocable " cague " qui a donné le verbe " caguer " (chier ). La cagole est une fille trop maquillée et montée sur pilotis (talons très hauts) à l’allure vulgaire qu’avaient les prostituées, arpenteuses de trottoirs sur lesquels on peut voir aujourd’hui des cagoles éviter les cagues de chiens).

    Michel Jacquet, au fil de l’écriture, n’a pu se résoudre à cette image péjorative et trop superficielle d’une fille issue du petit peuple de la Belle de mai… A la corbeille la cagole devenue une cagade littéraire (cagade signifiant " grossière erreur ou bêtise ") ! Pour son prochain roman, il nous présente une vraie héroïne de roman : Nina, une beauté méridionale conforme au joli nom de la Belle de Mai, quartier populaire du 3ème arrondissement de Marseille : " Concernant Nina, dit-il, j'ai préféré enlever ce coté cagole. J'ai trouvé qu'il était déplacé. En fait il était trop en décalage par apport à l'aventure qui arrive à cette femme. Donc pour parler de Nina c'est une jeune femme d'une trentaine d'année qui travaille dans une maison de retraite. Elle fait la connaissance de "Chouchou". Un homme d'une cinquantaine d'année élégant, charmant. Tous deux tombent amoureux. C'est à partir de ce moment là que l'histoire démarre. La jeune femme se retrouve involontairement mêlé à une équipe de mafieux de l'est mêlés entre autres aux trafics en tous genres : Femmes, cigarettes, drogue et j'en passe. Elle combattra avec fougue et vigueur ces voyous qui tentent de la tuer. Des personnages truculents vivent autour d'elle, Ma Moune, Loule et Papy Moustache entre autres, sans oublier le vieux bandit marseillais indispensable pour ce genre de récit. Un vrai faux polar en fait mais un moment de détente ou se mêle l'amour, l'amitié et surtout la dérision, la caricature ".

    L’inventeur du Nervi raconte toujours des aventures viriles mais sans machisme. Ses personnages féminins ne sont pas des cagoles. Dans Label Flic, le capitaine de police Florence Buget et Lucie, la tueuse, tiennent la dragée haute aux mecs, et les enquêtes du Nervi sont des récits habités par des personnages récurrents attachants.



    Avec Label flic, vous pourrez encore enrichir votre champ lexical de quelques vocables introuvables dans le petit Robert et le Larousse. Nous vous fournissons un petit lexique :

    - Mèfi ! interjection qui vient de " se méfier " et qui est une mise en garde ou le signalement d’un danger.
    - Une estrasse : à l’origine , c’est une guenille, un vêtement vieux ou de mauvais goût. Le mot désigne aussi quelqu’un de mal habillé mais aussi en qui on ne peut pas faire confiance, sans moralité. Par contre le verbe " s’estrasser " signifie éclater de rire.
    - Un chapacan : terme voisin d’estrasse puisqu’il désigne quelqu’un sans scrupule ou mal habillé, débraillé.
    - Se néguer : se noyer
    - L’engambi : un problème, une difficulté voire une embrouille volontaire ou même une petite traîtrise.
    - Un fadoli : un mec un peu fêlé du cerveau, l’idiot ou le gentil fada. Et fada ? Le mot viendrait du provençal " fàdo ", la fée. Le fada serait une personne enchantée par les fées, bizarre, voire dérangé mentalement. Mais on peut être fada d’une belle fille ou fada de l’OM et là le mot est synonyme de passionné et non d’idiot.
    - Morfler : recevoir des coups mais aussi accuser le coup sous le poids des ans, de la fatigue, des ennuis, des échecs…
    - Un gobi est un petit poisson avec de gros yeux. On fait des yeux de gobi sous l’effet de l’étonnement. A ne pas confondre avec " avoir le gaubi " qui veut dire être à l’aise, être beau parleur, être bien dans ses baskets.
    - Minot ou Niston et nine ou nistonne : petit garçon et petite fille.
    - Taulier : chef de service dans la police.
    - Le toti : l’ imbécile, le balourd.
    - Tu t’la donnes à donf : Tu te donnes à fond.



    Cette année Michel Jacquet sera dans la caravane des Nocturnes littéraires qui auront lieu la dernière semaine de juillet et la première quinzaine d’août. Cette caravane du livre s’arrêtera à Marseille, Sausset, La Ciotat, Bormes les mimosas, Toulon, Cassis, les Sablettes, Aix en Provence, Six fours etc… Pour plus de renseignements consulter le site Internet de l’auteur à la rubrique " actualité " :
    www.michel-jacquet.com



    Avec le succès, viennent aussi les récompenses et distinctions. Michel Jacquet et Lilian Berthelot ont reçu le prix du jury du festival "Le noir dans le blanc" de Vars pour une nouvelle intitulée "L'ivresse décime" ".


    Un extrait de " La neige décime " :
    Mais depuis quand Bathelot avait-il disparu ? De Guillestre jusqu’au refuge Napoléon, la question restait posée… Amateurs ou professionnels, les limiers se perdaient en conjectures, comme disent les gazettes. Lilian, le Sétois et son accent qui sentait l’anchois et le pastis, manquait cruellement à la joyeuse confrérie des polardeux du " Noir dans le Blanc ". Aucune trace à part les empreintes creusées par les motoneiges sur la neige fraîche.
    Les conjonctures se multipliaient au même rythme que les verres de génépi dans les gosiers en pente d’Eric Hossan et Thierry Crifo. Quant au flic Michel Jacquet, entre un match de l’OM et une rouste à coup de Minitel sur de malchanceux pré-mis-en-examen, Jacquet donc était dans le shwartz. Le noir si vous voulez, comme une soutane, comme un tunnel sans néon et sans fin. Bathelot avait bien disparu entre l’office du tourisme et la résidence Pierre et Vacances. Ca sentait le roussi et le Smalto noir, un parfum enivrant généreusement répandu dans la station.
    Lilian réapparut le dernier de cette troisième édition. Il s’était consacré, disait-il, à quelques devoirs de vacances – comment écrire une nouvelle policière – auprès de têtes blondes de l’école locale. A vérifier…



    Pour plus sur la toile :

    Bibliographie complète directement à l’adresse :
    http://www.michel-jacquet.com/bibliographie_096.htm

    Agenda volumineux directement à l’adresse :
    http://www.michel-jacquet.com/actualite_105.htm


    Yahoo!

  • De l'ubiquité insulaire aux pathologies de la démocratie...

     La philosophe Cynthia Fleury bientôt en Corse ! Dans ses ouvrages et ses conférences, elle livre, de façon pédagogique et interactive, les cheminements de sa réflexion avec la tolérance comme fil rouge. Elle ausculte la démocratie et réhabilite l’imagination. De l’imaginaire insulaire aux pathologies de la démocratie, elle philosophera en île.Entre l’écriture d’ouvrages et d’articles, l’enseignement, la recherche, les conférences, les débats, les colloques … elle trouve toujours le temps de venir sur l’île de beauté.

    Cette année, du 1er au 3 juin, elle sera présente au colloque " Iles. Expressions de l'imaginaire " organisé par Isula viva à l’hôtel Coralia de Porticciu ( près d’Ajacciu), autour d’une phrase du philosophe corse (ou Corse philosophe) Jean-Toussaint DESANTI : " Être né en Corse, serait donc porter en soi, dans son extrême singularité, le tourment de -l’ailleurs- ". Les journées se dérouleront en trois grands chapitres : insularité et origines, le mythe de l’éternel retour ; l’ubiquité symbolique " partir, revenir " ; enfin, insularité et destinées extraordinaires (Voir notre article " Qui suis-je ? Dans quel état j’erre ! " mis en ligne le 28/04/2007). Pour les renseignements complets, aller sur le site d’Isula viva : http://www.isulaviva.net/

    Par la suite, elle sera présente au Lazaret Ollandini pour Les quarantaines du Lazaret Ollandini 2007, qui se déroulent du 6 au 7 juillet sur le thème " Les politiques de la ,philosophie ". Le vendredi 6 juillet à 21h30, elle fera une conférence suivie d’un débat sur Les pathologies de la démocratie. Pour les renseignements, vous pouvez aller sur le site du Lazaret Ollandini : http://www.lazaretollandini.com/

    Cynthia Fleury est Research Fellow et Associate Professor à l'American University of Paris ( School of Government ). Ses travaux portent sur les conduites entropiques des démocraties, les outils de régulation démocratique et de gouvernance publique. Dans le cadre du CNRS (UPS 2262), ses travaux portent sur l'impact des nouvelles technologies de l'information et de la communication sur la définition des enjeux et des dispositifs démocratiques, ainsi que sur la refonte d'une théorie du politique dans le cadre d'une théorie de la communication. Elle est Maître de Conférences à l'IEP ( Institut d’Etudes politiques) de Paris. Sa conférence porte sur les " Principes, les Pratiques et les Pathologies des démocraties adultes " (Enjeux Politiques) et l'usage perverti ou rénové des fondamentaux démocratiques. Elle a publié plusieurs livres dont Dialoguer avec l'orient, (2004, PUF), Les pathologies de la démocratie (Fayard, 2005) et Imagination, imaginaire, imaginal (PUF, 2006). Elle est Conseiller scientifique du programme " Cap sur la diversité ", " programme départemental de communication, de formation et de réflexion pour une politique active d'intégration et pour l'égalité ".

    Cynthia Fleury est membre de l’Institut des sciences de la communication, une structure pluridisciplinaire au CNRS de création récente. Le fondateur de cet institut est Dominique Wolton. Dans la revue " Valeurs mutualistes " de mai – juin 2007, nous avons relevé une réponse faite par Cynthia Fleury à la question " Bien communiquer se réduit-il à une question de langage ? De langues ? " (propos recueillis par Katia Vitarasau) :
    " Pour bien communiquer, il faut pouvoir partager des valeurs. Une langue n’est pas un code, mais une vision du monde. En ce sens, ne pas préserver la diversité linguistique revient à entériner la disparition d’une analyse plus complexe et plus équitable du monde. Le pluralisme des langues est une condition et non un obstacle à l’acte de communiquer. Il rappelle notamment que le " dialogue des cultures " ne peut se réduire à un phénomène d’inféodation culturelle. "
    ... et Dominique Wolton de poursuivre: "J’ajouterais que la communication est synonyme de démocratie, car la démocratie c’est accepter de cohabiter avec des personnes qui ne pensent pas comme soi. Il en va exactement de même pour la communication. Celle-ci existe entre la volonté de convaincre, le souhait de partager et la nécessité de cohabiter. "


    En remontant dans des temps plus anciens, nous avons trouvé sur le Web les traces d’une revue philosophique " Les cahiers de la torpille " à laquelle elle participait. Cette revue se voulait semestrielle et nous n’avons relevé que trois parutions en 1998-1999. Cynthia Fleury avait traité deux thèmes:"Colonisation et sublimation " puis " On n'est pas céleste impunément"
    Dans le premier éditorial de cette revue, nous avons repris les premières lignes aux quelles elle avait souscrit :" […] La prégnance de la forme écrite est telle et la forme orale si discréditée qu'il semble difficile de justifier le recours à l'oralité des Cahiers de La Torpille. Nous faisons partie depuis si longtemps d'une civilisation de l'écrit que nous avons arrêté de nous méfier de discours pourtant privés de leur père, comme le notait déjà lucidement Platon. Aveuglés par le prestige de l'écriture, on ne s'afflige plus du tout de nos jours de la rigidité de l'écrit, de son caractère figé, définitif. L'effroi de Nietzsche de voir ses pensées "en passe de devenir des vérités" et avoir, dès le moment où elles sont couchées sur le papier, "l'air si impérissable, si mortellement inattaquable, si ennuyeux!" passe aujourd'hui pour une coquetterie d'écrivain. Refusant cette hégémonie de l'écriture, notre revue se propose de renouer avec une certaine oralité et plus précisément avec la forme dialectique elle-même, c'est-à-dire avec l'art du dialogue. Elle privilégie à cet égard la technique du torpillage utilisée par Socrate dans le Ménon de Platon afin d'engourdir ses interlocuteurs. Au-delà de la forme proprement platonicienne de l'échange dialectique, que nous ne reprenons pas à notre compte, au-delà aussi de la forme française de la conversation propre au XVIIe et XVIIIe siècle, nous voulons faire retour au mode d'une discussion qui, loin de mesurer les opinions à l'aune d'une improbable vérité, vise simplement à mettre à nu les ressorts cachés de toute conviction. L'entretien, la conversation ou le dialogue est d'abord, à notre sens, une joute, une sorte de duel. L'avantage du torpillage est qu'il provoque presque toujours une vive réponse de la part de l'auteur interrogé, qu'il l'incite au contre-torpillage, une fois qu'il s'est défait de son engourdissement premier… "


    Cynthia Fleury, docteur en philosophie, a déjà écrit quatre ouvrages qui traitent pour moitié de l’imagination et du soi, pour l’autre de tolérance et de politique. Son premier, " Métaphysique de l’imagination " (éditions des écarts, 2001), a été salué. Elle y montre combien l’imagination, la " folle du logis " selon Mallebranche, " la maîtresse de fausseté " pour Pascal et Descartes, a été méprisée par la philosophie européenne, jusqu’à concevoir une vision étriquée de " l’âme " et la psyché. Dans " Pretium Doloris. L’accident comme souci de soi ", (Pauvert 2002), elle étudie comment la connaissance de soi passe par la douleur et l’accidentel, quoiqu’en disent les champions modernes du positivisme. Dans " Difficile tolérance " (PUF, 2004), écrit avec Yves Charles Zarka, elle étudie l’absence de la notion de tolérance dans l’Islam, comment elle apparaît en Europe et chez les Encyclopédistes, et pourquoi le droit français devrait l’intégrer à son corpus sous forme d’un " droit à l’altérité ". Dans les " pathologies de la démocratie ", (Fayard, 2005), son dernier essai, elle montre comment les réformes démocratiques de 1789 ont été arrêtées par l’" épuisement nerveux " des révolutionnaires, et combien la démocratie doit toujours être revivifiée par les valeurs égalitaires et fraternelles de la première République.



    Nous vous présentons quelques ouvrages et articles de Cynthia Fleury dans un ordre arbitraire ( et sans doute pathologique), en commençant par " Pathologies de la démocratie " …

    Ouvrons une parenthèse...
    L’illustre Clemenceau, surnommé le Tigre ,décrivait la démocratie comme " le pouvoir pour des poux de manger les lions ". Quel mépris ! Etymologiquement " Démocratie " signifie le pouvoir du peuple… Il faut croire que le tigre avait mangé du lion et que les poux vexés pouvaient se mettre à manger du tigre. La démocratie devait être pour lui cet enfant " plein de rouges tourmentes " ou bien, enfant, avait-il rêvé des " chercheuses de poux " du poème de son contemporain Rimbaud. Ses déboires politiques avaient certainement blessé son orgueil… Finalement, il devait être orgueilleux comme un pou, cet homme-là... Arrêtons de lui chercher des poux dans la tête.
    Pour nos origines, nous avons craint un instant la catégorie de poux " Lécanie ", originaire d’Amérique, dite aussi " pou des Corses ". Heureusement, nous avions mal compris car il s’agit du " pou des écorces " qui s’attaque aux arbres fruitiers et non pas généalogiques. Ce pou américain n’entrerait pas dans les pathologies de la démocratie, pourtant toujours sujette à des démangeaisons sournoises qui cachent peut-être un mal plus grand, voire une maladie génétique pour laquelle aucun remède n’aurait encore été trouvé.
    Nous vous conseillons de lire l’ouvrage " Pathologies de la démocratie " de Cynthia Fleury qui gratte où ça démange. La démocratie apparaît souvent comme un moindre mal alors qu’elle devrait être un état de la bonne santé des rapports humains dans nos sociétés dites civilisées. Il ne s’agit pas de faire du mauvais pathos, de la rhétorique par des moyens propres à émouvoir l’auditoire mais de procéder, par une démarche épistémologique, à un examen clinico-philosophique prenant en compte les agents pathogènes et les antécédents historiques. Pour le diagnostic, on revient inlassablement à la quiddité de la démocratie et à ses principes fondateurs : la liberté, l’égalité, et la fraternité. Ces trois gènes républicains sont sains à condition de refuser les OGM de l’individualisme et les humanismes Canada dry.
    Fermons la parenthèse !

    Pathologies de la démocratie :
    Les beaux principes fondateurs de notre démocratie, que sont la liberté et l'égalité, sont-ils voués à dégénérer en exacerbation de l'individualisme et des identités, tyrannie du dépassement de soi, obsession de la transparence ? En indiquant par quels chemins nous pourrions passer de la démocratie naissante à la démocratie adulte, Cynhtia Fleury nous engage dans la voie de l'effort et de l'autolimitation au nom de la laïcité, de l'éminence de l'esprit public, de la responsabilité citoyenne et parentale.

    Nous avons trouvé un article qu’elle a écrit sur "Liberté - Egalité - Fraternité", un CD de textes lus par Orson Welles et Charles Boyer - direction artistique : André Bernard - Label : Fréneaux et associés. Ce CD présentait, pour la première fois, un historique sonore de la longue maturation des valeurs liberté, égalité et fraternité des intellectuels aux hommes politiques de l’Ancien et du Nouveau monde. Dans des interprétations historiques de Charles Boyer et d’Orson Welles, les textes font revivre pleinement la construction démocratique de l’Occident.
    Article de Cynthia Fleury ( L’Humanité) : "Profitons-en pour explorer la généalogie philosophique des idées républicaines, notamment celle de notre chère trinité . Depuis longtemps déjà ces notions de liberté, d’égalité et de fraternité taraudent les esprits. On pense à Voltaire, à Jean-Jacques Rousseau, et l’on réécoute ici leurs textes fondateurs, ou encore ces lignes de Michelet trop peu connues dans lesquelles il rappelle que " la cité n’est nullement une loi fixe et morte de bronze " mais une " initiation ", une " éducation mutuelle de l’ignorant par le savant et du savant par l’ignorant ". Tel est " le point de départ de toute politique sérieuse. Se rapprocher, s’estimer, se respecter ". Ni l’énergie du premier, ni la haute culture du second n’ont de légitimité à régner : elles ont à construire ensemble la souveraineté. Puis c’est au tour de Hugo de nous enthousiasmer avec l’inébranlable, l’inusable " roc " du droit dans le cœur du peuple. Et puis vient Péguy et sa " mystique républicaine ", cet instinct plus " sûr " que toutes les connaissances. De " pensées ", la politique est devenue simple marché de " propositions ". Le sentiment républicain n’est plus " organique ", il est " logique ". Les générations suivantes sauront-elles redevenir " mystiques "? Enfin, de Gaulle et l’idée d’une " France combattante ", d’une nation libre toujours unie pour la " rénovation de la patrie ", et, pour conclure, Jefferson et Roosevelt, qui par cette histoire sonore de la démocratie nous témoignent de sa construction plurielle."

    Liste des intervenants sur ce CD : Voltaire , Boyer Charles, Rousseau Jean Jacques, La Fayette , Danton , Michelet , Hugo Victor, Gambetta Leon, Peguy Charles, Clemenceau Georges, De Gaulle Charles, Jefferson Thomas, Welles Orson, Lincoln Abraham, Wilson Woodrow, Roosevelt.
    Textes fondamentaux de Voltaire, Rousseau, La fayette, Danton, Hugo, Gambetta, Peguy, Clemenceau, De Gaulle lus en français par Charles Boyer ainsi que les discours présidentiels de Jefferson, Lincoln, Wilson, Roosevelt interprétés en langue anglaise par Orson Welles.

    Pretium doloris
    " S'interroger sur l'accident, sur sa réalité, nous permet d'accéder à une autre compréhension de ladite réalité. L'accident peut se révéler un facteur de visibilité, une sorte de mise à nu de l'invisible. Il dit la vérité de l'énigme du réel qui nous entoure, son fracas. L'accident, comme la douleur, apparaît comme l'occasion privilégiée d'une rencontre avec la vérité. C'est un haut lieu de transformation et de capacité. Pour connaître le vrai, faut-il être capable de douleur et d'accident ? " Le pretium doloris, le prix de la douleur, parachève le " connais-toi toi-même " socratique et le " souci de soi " stoïcien.
    Quel risque est-on prêt à vivre pour connaître le vrai ? C'est grâce à la figure dionysiaque de démembrement et de métamorphose et à la catégorie de l'accident, pensée comme condition de possibilité d'une connaissance de soi, que le pretium doloris invente la critique imaginale du soi et son face-à-face avec le réel. Entre l'Orient et l'Occident, il y a l'accident. Orient désigne le lieu où l'âme se lève ; Occident, le lieu où elle s'exile et chute.
    Entre ce qui se lève et ce qui chute, il y a " ce qui arrive ". Comprendre la dialectique de l'accident, c'est accepter le nécessaire dialogue entre Orient et Occident.


    La Métaphysique de l’imagination :
    " Comment découvrir la porte d'entrée des êtres et des choses ? Comment accéder à l'autre, à tout ce qui n'est pas moi, à tout ce qui m'échappe et m'abandonne à la solitude ? Oui, je vais perdre ceux que j'aime. Oui, je vais mourir. Mais à cette certitude s'ajoute une grâce ou une énigme. Il existe des instants, des lieux à mi-chemin entre monde visible et monde invisible où le temps se suspend, où la dimension de l'un et de l'autre donne accès à une vérité plus belle et plus vraie. Seules ces rencontres inestimables avec l'autre nous aident à saisir le fait même de voir ou de penser. " Dans la Métaphysique de l'imagination, l'imagination est une âme ; les images sont, selon Bachelard, les " métaphores de la vie ". L'Orient et l'Occident s'absentent de la géographie pour devenir les pôles métaphysiques de la pensée. C'est quand l'imagination devient principe de réalité et d'événement que l'âme quitte son exil occidental pour accomplir son " lever " oriental. On approche alors d'un monde imaginal, situé entre sensible et intelligible, entre spiritualité et corporalité. C'est à la lumière de Sohravardî et en essayant de saisir la pensée de l'Imâm que l'auteur tente d'accéder à l'essence de l'imagination poétique, où la Révélation côtoie l'Intelligence. C'est grâce à Blanchot et à son interprétation de l'écriture et de la lecture qu'elle entrevoit le face-à-face ultime avec la lumière de l'autre : la source d'où émane la connaissance de soi. C'est avec Ibn Arabi, Rûzbehân, Kant, Lévinas et Rilke que l'auteur fait l'apprentissage de l'imagination poétique et créatrice... Cette démarche définit une " impiété filiale " qui se révèle être la véritable fidélité à l'Un. En vous proposant de partager son sillon, l'auteur vous convie à devenir le pèlerin de ce voyage dans le réel qu'est l'imagination.


    Imagination, imaginaire, imaginal
    A l'opposé d'une tradition philosophique, principalement occidentale, qui n'a eu de cesse de vilipender l'imagination, il existe une histoire de la philosophie selon laquelle l'imagination, l’ imaginaire et l'imaginal participent pleinement de l'activité noétique ( la noèse est l’acte même de penser et le noème est l’objet de la pensée) et détiennent une dimension herméneutique ( Ils peuvent être interprétés et sont donc sources de connaissance).
    Loin d'être cette puissance d'aliénation et de mystification, la faculté imaginative possède au contraire un véritable rôle dans la recherche de la vérité, permettant à l'homme d'accéder à des pans entiers de la réalité qui, sans elle, lui resteraient à jamais étrangers. Ce volume se propose de redéfinir ce lieu de " rencontre" et de " négociation "entre l'âme et le monde qui l'entoure, te sensible et l'intelligible, le spirituel et le corporel, le visionnaire et le conceptuel, et d'inviter à découvrir ces promoteurs du paradigme imaginal qui n'opposent pas au grand rationalisme l'activité imaginatrice. Que ce soient Sohravardî, John Smith, René Descartes, Henry Corbin ou Jean-Paul Sartre, tous ont eu à cœur de se libérer de la dichotomie raison/imagination pour penser plus rigoureusement le réel et ses événements.


    Manifeste pour une nouvelle école écrit avec Jean-Luc Muracciole -
    Dans le Manifeste pour une nouvelle école, Jean-Luc Muracciole, directeur de la collection et collaborateur de François Dagognet, s'associe avec Cynthia Fleury pour présenter une nouvelle structure expérimentale destinée aux élèves en rupture de scolarité. La collection " Nomad’s land " des Editions " Little big man " est apparue dans le paysage de l’édition pédagogique en 2004, en s’engageant dans le renouveau. Son directeur était déjà à l’origine de structures expérimentales pour les exclus du système et engagé dans une réflexion sur d’autres modes d’enseignements possibles.



    Mallarmé et la parole de l'imâm :
    " Obscurité mallarméenne et science de l'imâm. Mallarmé et l'imâm savent ce qui les sépare de Dieu ou de la poésie, c'est eux-mêmes : le voile, symbole de la descente de l'Idée, devient le lieu de la conquête poétique du soi. Il découvre le fondement du réel : l'aperception du rythme éternel ou aperception de l'inouï. Entre la fiction et le vers, entre le sens et la mesure, la poésie s'énonce. On entend dans le vers l'inaudible, ce qui pousse l'inouï vers l'in-ouï, vers sa limite in-finie. À l'instar de l'imâm, le poète connaît le peu de valeur d'un sens découvert. Entre le sens et la littérature, il y a l'Idée ou la subtilité de la musique. Cette alchimie du sens et de la littérature, c'est proprement de l'in-ouï, l'ampleur du vers mallarméen conjugué au vent naturel qui souffle dans la demeure d'Igitur. Comme les Noces d'Hérodiade, les noces de l'imâm et de Mallarmé sont solitaires : face-à-face du seul avec le Seul. La noce ne dit plus la fusion, mais la condition phénoménale du monde et la vérité de l'intelligibilité. Le monde apparaît parce que la noce existe. Pourtant, la noce est vierge et créatrice. Face-à-face ultime entre science de l'imâm et parole poétique : Hérodiade, nom divin, " pierre précieuse ", est indissociable d'une effectivité qui se traduit dans le verbe du prophète. Il est le " chaton de sagesse ", centre langagier, puissance hallucinatoire. Accéder à la sagesse, c'est accéder à la véracité du phénomène, à l'apparition sous l'apparence, ou encore à la disparition nécessaire du soi devant l'invisible de la Face. "


     Difficile tolérance
    Un ouvrage en collaboration avec Charles Zarka : Ce traité sur la tolérance, qui occupe la plus grande partie de l'ouvrage, est suivi d'une réflexion critique de Cynthia Fleury qui porte sur les rapports entre l'Occident et l'Islam. Difficile tolérance se termine ensuite par un entretien entre les deux auteurs qui reprennent les principaux éléments de leur réflexion pour évaluer avec le lecteur l'applicabilité du concept de " structure-tolérance " dans le contexte de la France actuelle et, de façon moins spécifique, dans les autres démocraties constitutionnelles.
    Dans son essai, " La crise contemporaine de la tolérance : Islam ou Occident ", qui constitue la deuxième partie de Difficile tolérance, Cynthia Fleury s'engage dans la tâche d'interroger la tradition arabo-musulmane sur la notion de tolérance. Elle se livre donc, dans cette perspective, à un travail de déconstruction idéologique de certaines croyances islamistes.
    Cynthia Fleury affirme que l'Islam n'a pas pu penser la tolérance alors que dès l'Hégire les pays arabo-musulmans se trouvaient dans une situation plurireligieuse voisine de celle de l'Europe au moment des guerres de religion. L'altérité ne peut pas exister pour l'Islam qui pense plutôt en termes de territoires, de domaines, de maisons : 1. la maison du frère, c'est-à-dire du même, dâr al islam, on y retrouve la famille, le clan, la tribu et 2. la maison de l'ennemi, dâr al harb, la maison de celui qui ne fait pas partie de dâr al islam. Le devoir de défendre ce domaine contre celui qui n'en fait pas partie c'est le jihad. Bien que la distinction des dâr ne se trouve littéralement ni dans le Coran ni dans la Sunna, elle demeure " indiscutée pendant de longs siècles " et la fracture qu'elle sous-entend fonde les scissions politiques et culturelles que l'on connaît. […] Tant que les dénominations de dâr al islam et de dâr al harb prévalent, l'éternité du jihad est obligatoire et la " guerre permanente " lui est indissociable.
    Cynthia Fleury considère par ailleurs que la dhimmitude souvent évoquée comme étant la forme qu'a pu prendre la tolérance chez les musulmans ne correspond aucunement à ce que l'Occident entend par tolérance. Le statut de dhimmî a été aboli en 1839 par un décret impérial ottoman, l'édit de Gülhane, mais il a perduré au-delà de cette date de façon officieuse. L'étranger, le vaincu, qui vivait dans le monde musulman d'avant 1839 était " protégé " par son statut de dhimmî. Ses vêtements et le type d'impôt qu'il devait payer le distinguaient du reste de la communauté. Protégé ou persécuté, ce qui semble certain c'est qu'il n'avait pas un statut de " citoyen " à part entière. Le dhimmî n'était pas un frère, mais il ne pouvait pas non plus être un ami parce que dans la perspective islamiste Dieu seul est l'ami. Dans ce contexte idéologique de l'Islam, la séparation des sphères privée et publique, du religieux et du politique ne peut pas non plus avoir lieu.
    Aucune religion n'est par essence tolérante, mais l'Islam, historiquement et pour des raisons idéologiques, n'a pas pu penser la tolérance. Après avoir voulu, dans son essai, mettre à l'épreuve le concept juridico-politique de " structure-tolérance ", elle se joint à Yves Charles Zarka pour échanger sur " l'applicabilité " de ce nouveau concept. Les deux auteurs tiennent des propos inquiets sur les perspectives de résolution des tensions actuelles entre l'Occident et l'Islam, celles qui ont cours en France plus particulièrement. Mais tout en réaffirmant avec vigueur les valeurs et les principes de la démocratie, cet entretien est aussi une occasion de prendre position contre une certaine tendance actuelle à la négociation et au compromis au sein de pays régis par une constitution libérale.

    Dialoguer avec l’Orient :
    " Le dialogue se serait-il rompu ? A-t-il d'ailleurs jamais réellement existé ? Nous vivons dans un monde divisé, ayant fait le deuil de l'idée de fraternisation universelle, toujours prompt à penser un usage territorial des concepts, l'irréductibilité des idéologies et les cultures en termes de " frontiérisation " indépassable. Or, pour modifier le contexte " sinistré " des relations de l'Occident avec l'Orient arabo-musulman où la concurrence des hégémonismes et l'intransigeance des volontés de domination prévalent de part et d'autre, pour redéfinir un horizon possible de la réconciliation, le " dialogue " est nécessaire. Sans doute, un nouveau dialogue, un dialogue à inventer ou à réinventer, peut-être à rénover. C'est en faisant " retour " à la Renaissance que l'on se propose de chercher des schèmes de dialogues permettant de s'articuler, de façon critique et généreuse, au monde contemporain, et d'inventer un nouveau rapport entre Orient et Occident. Ce " retour " n'a rien de passéiste. Il est au contraire une modalité de " réouverture " du dialogue avec l'Orient et la possibilité de lui découvrir une " mémoire ". Contre l'absence et l'oubli du dialogue actuels et la déchirure civilisationnelle, la reformulation de nos héritages communs semble l'unique ligne de fuite indépassable.



    Cynthia Fleury participe à de nombreux travaux collectifs et à diverses revues dont " Cités " :

    Hors série : L'Islam en France : Soixante-dix intellectuels prennent la plume pour appeler les musulmans de France à une "critique radicale" de leur vision du monde, dans un livre intitulé "L'Islam en France". Cette somme d'informations et recherches sur la communauté musulmane française, le Coran et les contextes historiques dans lesquels l'islam s'est développé, le discours et les méthodes actuelles des islamistes, devrait rapidement s'imposer comme un ouvrage de référence. C'est également un livre de combat, qui offre tous les outils intellectuels pour la réaffirmation des valeurs républicaines mises à mal par les intégristes musulmans, et leurs thuriféraires, plus ou moins conscients. Les trois concepteurs de L'Islam en France, Yves-Charles Zarka, directeur de recherche au CNRS, la philosophe Cynthia Fleury, également chercheuse au CNRS, et l'écrivain Sylvie Taussig ont sollicité quelque soixante-dix intellectuels – démographes, sociologues, philologues, anthropologues, historiens, islamologues, philosophes des religions..
    Dix Questions sur l'islam en France : Un étrange secret : combien y a-t-il de musulmans en France ? - Le Conseil français du Culte Musulman : une solution ou un problème ? - Les territoires conquis sur la République - L'islam en trompe l’œil : presse, radio, télévision, Internet - À la recherche de l'identité perdue - Les femmes : infériorité et oppression - Les frontières du culte - L'argent de l'islam - Stratégies d'islamisation vers un islam européen ? - Islam : vers une phase critique ?

    Hors série : La France et ses démons, annoncé comme une radioscopie des passions françaises. Les démons radioscopés sont ceux de l’exception, de la révolution, de l’étatisme, du monarchisme, du populisme, de l’extrême-droite, de l’anti-américanisme, des médias, des honneurs, du moralisme et de l’antisémitisme.


    Cynthia Fleury communique beaucoup. On la retrouve dans la Chronique libertaire à l’adresse :
    http://1libertaire.free.fr/index.html. ( Ce site est consacré à l'idée libertaire par Philippe Coutan)
    et dans une autre Chronique sur le Web de l’humanité à l’adresse :
    http://www.humanite.fr/journal/chroniques/52/lachroniquedecynthiafleury/

    Vous avez peut-être vu la philosophe dans une émission télévisée "Décryptages", sur la chaîne du Sénat : 26 minutes pour décrypter le travail du Législateur, celui des commissions parlementaires ou encore celui des colloques. Cynthia Fleury y fait découvrir tous ceux qui contribuent à enrichir la réflexion démocratique contemporaine et la vie parlementaire. Mêlant extraits d'auditions publiques, analyses et comptes-rendus des séances, l’émission se veut un laboratoire où s'élabore la pensée démocratique. -fiche de l’émission à l’adresse ci-dessous:
    http://www.publicsenat.fr/emissions/emission_detail.asp?emission=31


    Yahoo!

  • Jacques Mondolini, un Corse qui écrit:



    Jacques Mondoloni est né à Paris en 1941. Réalisateur de courts métrages, critique et animateur littéraire, régisseur de spectacle, il publie romans, nouvelles et pièces de théâtre à partir de 1980. Aujourd'hui, il consacre de plus en plus de temps à l'écriture romanesque, tirant son inspiration des phénomènes sociaux de notre époque. Il est un auteur connu pour ses ouvrages de " science-fiction ", américanisme par lequel on désigne des œuvres d’imagination scientifique qui décrivent un état futur du monde. Il est passé maître dans la fiction de la science parce qu’il possède la science de la fiction, c’est-à-dire qu’il construit ses récits " avec une science consommée " , un savoir-faire habile et savant.
    Il excelle dans l’écriture de nouvelles. Il s’agit là d’un exercice littéraire plus difficile qu’il n’y paraît car, dans un texte court mais dense, il consiste à offrir un récit à fort impact sur l’imaginaire du lecteur. Chez les plus jeunes, la nouvelle est un magnifique outil pédagogique lorsque l’on connaît la place de l’imaginaire chez eux, avant qu’elle ne se réduise trop souvent à un strapontin jamais déplié. Heureusement, des enseignants s’éreintent encore à promouvoir la lecture auprès de leurs élèves, en faisant venir dans leurs classes des écrivains comme Jacques Mondoloni. Nous avons retrouvé trace d’un atelier d’écriture dans la classe du Lycée Ernest Bichat à Lunéville :
    " Chronologie du projet par Sarah Garon, professeur de Lettres, Lycée Ernest Bichat de Lunéville. Le crime : la parution d'un recueil de nouvelles policières, en mars 1996. Comment cela a-t-il vraiment commencé ? quel était le mobile ? quels sont les coupables ? Un petit indice : " Ils étaient trente et un... " Mais qui sont-ils ? Simplement une classe de lycéens, tous doublants, leur professeur et un auteur de roman policier connu : Jacques Mondoloni. Notre histoire a commencé à l'aide d'un simple élément moteur : la motivation, une envie de se prouver et de prouver aux autres qu'il était possible de créer de toutes pièces une œuvre, un livre. Objet tant redouté des élèves lorsqu'ils sont simples lecteurs, mais qui se métamorphose en élément merveilleux quand ils en deviennent les auteurs et les éditeurs. Cette classe remplie "d'élèves en difficulté" devait devenir une équipe capable de réussir. "


    Jacques Mondoloni, avec la science-fiction, est un auteur d’anticipation. Avec le roman noir, il s’ancre dans le présent. Il n’oublie pas l’importance du passé dans son ouvrage " Récits de vies au petit Nanterre " où il évoque, de façon sensible et chaleureuse, l’histoire, la vie, les luttes à partir d’entretiens réalisés avec les habitants de ce quartier appelé le Petit Nanterre.Il s'intéresse encore à la mémoire des villes dans un autre opus "Le Quartier d'où je viens". Il est l'auteur d'une vingtaine de romans et de plusieurs recueils de nouvelles qui abordent tous les genres littéraires.

    Après une carrière de cinéaste et de régisseur de spectacles (qui lui ont inspiré plus tard Tenue de Galère (Denoël), Jacques Mondoloni s'oriente vers la littérature au début des années 80. Il ne tarde pas à se faire reconnaître dès 1983 en décrochant le Grand prix de la Science-Fiction Française pour un recueil de nouvelles : Papa 1er (Denoël) qui vient d'être réédité aux éditions Melis en 2005. C'est dans ce recueil que se trouve "Le Cancer de l'Escargot", l'une des meilleures nouvelles de ces trente dernières années, selon la revue Galaxies, la référence dans le domaine de la Science-Fiction.

    Auteur prolifique, il a touché à tous les genres dont Le roman noir avec plusieurs ouvrages parus : Le jeu du petit Poucet (Série Noire), Corsica Blues (Atalante)... On lui doit également deux pièces de théâtre: Boris, une adaptation librement inspirée de "En Avant la Zizique..." de Boris Vian, mise en scène par Yves Pignot, et montée au Théâtre de
    Billancourt et à Louvain la Neuve , pour la saison 1990-91. La seconde pièce "Voyages", lue en 1991 au théâtre Essaïon et à Avignon, rejoint la science fiction.


    Le polar ( roman noir) et la Corse

    Dans le recueil de Nouvelles "Corse noire " (collection Librio),  Jacques Mondoloni, avait écrit un récit apocalyptique sur la Corse : Le dernier Corse. Le seul survivant y est un prêtre qui refuse de quitter la Corse sous les bombes incendiaires d’une armée envoyée par un pouvoir qui a décidé de couler l’île, comme l’on coule un vieux rafiot devenu inutile. Avant de mourir le curé écrit son journal. Il s’appelle Pascal Géronimi, de père corse et de mère anglaise. Il se raconte pour expliquer son choix de rester en Corse et d’y mourir en dernier témoin. Nous avons relevé ce passage final : " La terre ne fait que vibrer, et cette fois, je comprends pourquoi : la montage s’affaisse, je découvre l’abîme, des abysses vertigineux, des puits sans fond qui se remplissent de liquides et fusent comme des volcans : la Corse a été minée… ". Plus loin,  " Le Cap corse se décroche de son socle – On dirait une immense caravelle dérivant sur la mer".

    Les lecteurs corses ont sans doute découvert les polars de Jacques Mondoloni avec la sortie de Corsica Blues aux Editions Atalante, dont nous rappelons la présentation :


    La sirène retentit. On allait débarquer. Dominique Quilichini poussa un soupir. C'était fini. L'exil commençait.
    Printemps 1932. Chassé de son village corse à la suite d'une ténébreuse affaire de meurtre, Dominique arrive à Marseille avec son fils François pour trouver refuge chez l'oncle Joseph, le " juge " de la famille. En fait de juge, c'est chez un proxénète qu'il tombe, dans un bordel du Quartier Réservé, parmi la pègre des borsalinos et des torpédos. La guerre des gangs fait rage...

    Le roman noir s'accorde bien au ciel des montagnes corses et aux couleurs de Marseille ; la lumière brutale lui convient. Romancier de l'ambigu, des malentendus tragiques et des êtres en dérive que la vie emporte, Jacques Mondoloni le sait bien aussi : nul besoin d'instance surnaturelle à la tragédie, il suffit de raconter l'irréparable divorce entre le cœur de l'homme et son destin …

    Comment échapper à la corsité, lorsque l’on porte un patronyme chargé d’une généalogie si fortement enracinée ? Jean-Toussaint Desanti, à ce sujet a dit : " Jamais je n'ai écrit en langue corse une ligne de philosophie. Mais là n'est pas l'essentiel. Je crois avoir pratiqué la forme de philosophie qu'exigeait mon origine. Dans ce champ aussi j'ai, autant que je l'ai pu, pourchassé l'indétermination, fait violence à la culture, effacé la mer, celle qui sépare et engloutit ".


     Avec " Corsica Blues ", Jacques Mondolini est l’auteur d’un polar corse, parce qu’il est tout simplement un Corse qui écrit. Il faut citer aussi " La ronde des fantômes ", roman du retour sur soi, des trajectoires de vies brisées par le destin, la société, les choix individuels malheureux, "La Ronde des fantômes" raconte le lancinant ballet des figures perdues, ancêtres, parents, enfants et amis, dans le lent cheminement d’une vie déracinée. Et puis il y a la Corse, lentement effacée, mais portée au cœur comme un talisman et qui subitement réinvestit avec force ses territoires autrefois délaissés. Un roman optimiste donc, un roman de la reconquête…


    D’autres polars dont il est l’auteur :

    Le Jeu du Petit Poucet ( Un tueur à gages sans gages, ça peut devenir furieux. Ne vous avisez pas d'" oublier " le paiement, le contrat pourrait se retourner contre vous. D'abord, vous recevrez un signe. Si vous ne voulez toujours pas comprendre, les manifestations se feront de plus en plus pressantes et macabres : c'est le jeu du Petit Poucet. Le tueur a eu le temps de le roder depuis l'Algérie, mais aujourd'hui, les règles lui échappent, le chasseur est devenu proie...)
    C’est pas tous les jours revanche ( C'est tous les jours revanche pour Jules, jeune fils d'Odile aux multiples fiancés, tombée pour trafic de drogue, et fils fasciné par un homme trop habile avec son Smith et Wesson Spécial 38 pour avoir un vrai travail. Les permissions de week-end permettent à Jules d'échapper au " centre " et à ses travailleurs sociaux préposés à la réinsertion grâce à des parties de campagne proposées par son père. La campagne, c'est-à-dire les jardins " familiaux " plantés de cabanes semblables, à la lisière des villes nouvelles. Avec un parent emprisonné et l'autre traqué, il faut quand même grandir, il faut capitaliser toutes les petites joies possibles, s'évader avec Jules Verne ou se saouler à l'euphorie en rêvant de jours meilleurs)


    Plus récemment, dans sa bibliographie, nous avons découvert "Marchand de torture " dont nous reproduisons la présentation avec un extrait ci-dessous :
    Il y a une station d'autobus dans la banlieue marseillaise qui évoque à la fois le voyage et son renoncement : c'est Rimbaud-Baumettes devant la prison du même nom. Parce qu'il a lu en prison une biographie du "poète aux semelles de vent", le héros du roman, Toni Bonneveine, trouve cette association insupportable. Sa première idée d'homme libre est d'effacer le nom de Rimbaud du panneau de l'abribus. Cette obsession, d'autant plus violente qu'il ne parvient pas à passer à l'action, va le conduire à entrer, par l'intermédiaire de son avocat, en relation avec des malfrats pour qu'ils réalisent son étrange projet. Il est loin d'imaginer qu'il va devenir le cobaye d'un truand mégalomane et pervers, Joseph Carco, qui a abandonné le trafic de drogue pour se recycler dans la torture "clés en mains". Grâce à des "expériences scientifiques", "le Marchand de Torture" espère monnayer les résultats de ses recherches auprès des dictateurs et autres services secrets. Dans la lignée des grands maîtres du roman noir français, Jacques Mondoloni nous tient en haleine jusqu'au bout. - Luciano Melis
    Extrait du livre :
    Le cabinet d'Alphonse Lacour se tenait au premier étage d'un immeuble cossu et sale de la rue Grignan, presque en face du musée Cantini. De son bureau vert d'eau, simple, propre et clair, on avait vue sur le portail, la cour intérieure, la mise en place des expositions qui se traduisait par l'arrivée de camions déchargeant des caisses. Cette partie de la rue se transformait en voie réservée, hors trafic, presque piétonne. D'ailleurs, les riverains s'en persuadaient et des pétitions de commerçants circulaient pour faire interdire la circulation. Une décision municipale n'aurait pas nui aux affaires, et la rénovation des façades qui avait été entreprise, à certains endroits, près de là, peut-être l'annonçait.
    Toni Bonneveine aimait contempler les cadres sortir des hayons et tanguer comme des harpes. Il aimait également s'attarder devant les boutiques de mode qui fleurissaient la chaussée. Des couleurs gaies, naturelles ou électriques, jaillissaient des vitrines et venaient frapper les porches des études de notaires ou d'avocats qui s'étaient approprié les lieux. Les plaques des raisons sociales, calligraphiées à l'ancienne : lettres dorées sur fond noir, s'enflammaient au rythme des enseignes et cette pacifique agression donnait à Toni le courage d'affronter la cage d'escalier aux relents de cave, l'ascenseur archaïque à la câblerie couverte de graisse sèche qui menait au cabinet de son défenseur.
    Toni sonnait toujours deux fois alors qu'un panneau indiquait qu'on pouvait entrer sans frapper. Une employée venait lui ouvrir et le faisait asseoir dans un fauteuil dirigé vers le couloir principal où des stagiaires s'interpellaient et se cognaient. Là, il pouvait observer la ruche judiciaire bourdonner, mettre un prix sur les meubles modernes qui servaient de séparation dans la salle commune. Là, il pouvait jauger le pouvoir d'Alphonse Lacour.
    Celui-ci apparaissait et par un signe lui demandait de patienter. Quand l'avocat raccompagnait un client jusqu'à la porte, Toni l'entendait vanter les ordinateurs dont il s'était équipé. "Je suis informatisé !" lançait-il comme il aurait dit : "Je suis dépucelé
    !"


    Un roman insolite:

    Richard Cœur-de-lièvre
    ( paru en 1993):
    Richard, conscrit : à la caserne de Layserberg, il songe à celle qu'il a laissée aux " Sables ". Dans la montagne proche, il crapahute ; vaguement, il s'éloigne.
    Nichte, lieutenant : entre les soirées de sous-préfecture et la maison de Mlle Firma, il traîne son indifférence inquiète. Il observe Richard, aussi.
    Franz Beck, conservateur du " musée des Commandos " : immobile, il espionne, tapi au milieu de ses antiquités mensongères. Ah ! le casoar du lieutenant... Car ce monde est truqué ; gentiment technologique, mollement autoritaire, il a gommé son histoire que de rares " passeurs " de mémoire tentent de ranimer.)



    La science-fiction...


    On ne peut pas parler de Jacques Mondolini sans revenir sur son ouvrage Papa 1er ( Première édition chez Denoël en 1983) pour lequel il a été primé et qui a recueilli les louanges de l’ensemble des critiques parmi lesquelles :
    " Jacques Mondoloni va à la rencontre de nos désespoirs et les guérit à coup d'humour noir et de lucidité ". Thierry Hubert Le Dauphiné Libéré
    " Tout un voyage dans les "ailleurs" avec des "autres" qui sert à l'auteur, à travers un humour grinçant, à nous mettre face à nos réalités, à nos savoirs perdus, à une science déshumanisante. Mondoloni pioche loin dans notre déstructuration progressive, dans la conscience de notre inconscience ", ajoute Robert Inard d’Argence dans La Provence
    " Authentique conteur, très imprégné par la SF anglo-saxonne et en particulier Philip K. Dick. "Papa 1er" est de ces ouvrages qui incitent à continuer à lire de la SF, envers et contre tout... " Stéphanie Nicot Galaxies Science-Fiction
    " Les thèmes sont originaux et passionnants, et le style, riche sans être ampoulé, frappe par l’abondance d’adjectifs rares et un sens aigu de l’expression imagée ". Bruno Peeters Phenix Mag
    " Mondoloni brasse une multitude de thèmes d'où émergent quelques unes de ces grandes préoccupations, écologiques, politiques, et de ses interrogations sur l'emprise des machines, l'humanité... " Véronique Emmanuelli Corse-Matin Hebdo


    Dans la science-fiction, nous avons relevé sur sa série " Les Goulags mous " sa dédicace faite à Radio France sur le site de cette radio:
    " Lorsque, dans les années 80, je me suis lancé dans cette saga du futur que j'ai appelée : "Les Goulags Mous" et qui a été publiée au Fleuve Noir, j'avais en tête d'apporter une réponse au "1984" de Georges Orwell. Le roman d'Orwell, on s'en souvient, décrit un monde totalitaire où les individus sont enrégimentés, broyés, sous la surveillance constante de la Police de la Pensée. Même l'amour que peuvent avoir un homme et une femme l'un pour l'autre est un crime contre l'Etat. Bien sûr, Orwell, qui avait été échaudé par le communisme pendant la guerre civile espagnole, se voulait un visionnaire désespéré, voyait l'avenir de l'humanité tout en noir. Pendant un temps, sous Staline avec ses purges et ses procès, sa vision a pu correspondre à la réalité. Mais l'univers communiste craquait et j'ai imaginé qu'il allait se transformer. Le communisme se répandrait partout et imposerait sa loi au globe. Une immense fédération d'Etats se mettrait en place, ne devant plus grand chose à l'idéologie de naguère. "Les goulags mous" remplaceraient les goulags durs. Et une brigade de télépathes prendrait la relève de la Police de la Pensée. Voilà pour le décor, le point de départ. Mais ce n'est pas la politique-fiction avec ses constructions et ses hypothèses qui m'excite en premier lieu. Comme tout romancier, c'est l'homme qui m'intéresse, l'homme fait de chair et de sang, avec ses folies, ses rêves et ses douleurs. Et les héros qui me fascinent, ce sont les marginaux, les rebelles, les fouteurs de merde, tous ceux qui d'une manière ou d'une autre par leur grain de sable enrayent la machine. J'ai donc mis en scène un télépathe dévoyé, un chien de garde du régime qui ne veut plus mordre et qui par sa révolte va déstabiliser un système qu'on croyait solide. Et comme j'aime les jumeaux, je lui ai créé un clone qui se comporte tantôt en protecteur, tantôt en frère ennemi... " (Jacques Mondoloni)

    quelques couvertures:





    Le théâtre...

     Le résumé de sa pièce de théâtre : Voyages.
    Les habitants de "La Cité du Bonheur" veulent échapper à leur triste réalité et consomment de la virtualité, par le biais de drogues et de programmes TV dans lesquels ils se projettent. Chaque soir, n'importe quel locataire peut commander un programme et devenir quelqu'un d'autre. Mais, les retours sont difficiles et les couples se désagrègent car chacun est parti dans un "voyage" différent de l'autre. Le premier couple de la pièce semble se résigner, mais le second résiste et décide de s'installer à la campagne, à l'écart de la société. Mais peut-on se construire une autre réalité, n'est-ce pas encore se bercer d'illusions ?



    Et le cinéma adapté à la littérature...


    « Les Milles, le train de la liberté » est une fiction cinématographique historique réalisée par Sebastien Grall. Jacques Mondoloni a écrit le livre d’après le scénario de Sébastien Grall et de Jean-Claude Grumberg. Parmi les principaux acteurs du film, on y retrouve Jean-Pierre Marielle et Philippe Noiret.

    En mai 1940, en pleine débâcle, un camp d'internement pour les ressortissants des puissances ennemies, pour la plupart juifs ou opposants à l'Allemagne Nazie, est improvisé dans un village proche d'Aix en Provence, Les Milles (avec un « s »). La vie du camp s'organise sous le commandement de l'intègre Charles Perrochon, assisté d'un capitaine borné, Moinard. Les Milles" c'est le village provençal d'une ancienne briqueterie transformée en camp d'internement, en 1940, où on interne des civils allemands, autrichiens, polonais, qui avaient trouvé asile en France. Ils sont juifs, communistes ou simples opposants au nazisme. Parmi eux, deux prix Nobel, des artistes, des intellectuels. Le peintre Max Ernst y a été enfermé. Charles Perrochon, commandant français des "Milles" est chargé de leur protection. Mais le jour où la France signe l'article 9 de l'armistice, les autorités décident de livrer les réfugiés du camp aux Nazis. Perrochon refuse et, au risque de passer en conseil de guerre, affrète un train et un bateau pour tenter de conduire les réfugiés au Maroc... Le film montre donc un officier de l'armée qui s'insurge contre le sort réservé à des artistes menacés de mort. Nous avons trouvé un site consacré au camp des Milles qui devrait prochainement devenir un mémorial :
    http://perso.orange.fr/d-d.natanson/artistes_milles.htm


    Yahoo!