• L’édition corse en Pologne : <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p></o:p>

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    Fin 2006, la revue littéraire polonaise « Zabudowa » (site http://zadudowa;républika.pl/zt/zt.html ) publiera une édition spéciale (vendue en kiosque avec, en plus, une publication sur le Web)) faisant une place dans ses rubriques  à l’édition Corse.  Joël Jégouzo de NoirCommePolar a accepté gentiment de publier l’un de ses articles qui paraîtra en Pologne et que nous mettons en ligne ci-dessous :

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    Le Polar Corse : Chjam’è rispondi.<o:p></o:p>

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    La Corse publie. Beaucoup. La Corse invente. Beaucoup. Sans doute son insularité (géographique et culturelle) y est-elle pour quelque chose dans ce regain d’invention et d’expression qui la marque aujourd’hui. Son « insularité », ou plutôt, la prise de conscience de sa place dans le monde. Le « monde », oui : les cinq continents. Le sentiment que sa « corsitude », ce sentiment d’appartenir à une entité historique, culturelle, que l’on vit ailleurs comme menacée, justement dans ses dimensions insulaires, méditerranéennes, ne l’est pas en réalité. Changeons de vocabulaire donc : laissons le mot de « corsitude », chargé des représentations stéréotypées que le vieux continent a forgé d’une île imaginaire vouée à un sot exotisme, aux dépliants touristiques et parlons plutôt de « corsité » : le fait d’être corse, dans un monde globalisé, est une chance. Explorons cette corsité, semblent proclamer les éditeurs corses, dont l’ambition s’affiche à hauteur d’un investissement proprement militant pour que cette culture rayonne enfin, comme s’ils étaient persuadés que l’ancestrale culture corse représentait non seulement le salut pour la nation corse, mais un vrai laboratoire des mondes à venir.

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    Car voici que confluent brusquement de sérieux héritages pour former les conditions d’un (re)surgissement exemplaire — celui du fait Corse. Au point de confluence, l’héritage culturel de la diaspora corse, la culture orale corse et la volonté d’être corse par-delà les dérives identitaires et les reniements de toutes sortes, leur tentation du moins, dans un monde culturellement aliéné à la civilisation libérale américaine.<o:p></o:p>

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    L’héritage de la diaspora corse tout d’abord. On l’a dit de bien d’autres nations : c’est une chance de posséder une forte immigration à l’étranger, formant les têtes de pont d’une culture vivante, exposée au défi d’exister envers et contre l’exil. Une diaspora donc, non seulement ambassadrice du fait corse, mais et peut-être surtout, communauté affrontée aux autres cultures, sachant mieux mesurer les défis du monde, tel qu’il les réorganise.

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    Au point de convergence, toujours, l’héritage de la culture orale corse — nous y reviendrons. Enfin, la volonté d’être corse : un corps, plutôt qu’un corpus à ressasser. Et donc la nécessité de rompre avec une représentation véhiculée par le vieux continent d’une terre mystifiée — et par mystification, entendons toutes les dérives intra et extra muros que la Corse a connues ou subies. Car le mythe impose une rhétorique et une langue dont il faut s’emparer. C’est bien ce que les éditeurs corses ont compris, qui convoquent désormais la littérature mondiale autour du texte corse. Faisant ainsi entrer de plain pied dans la langue corse une géographie expansive qu’il nous est possible, enfin, d’entendre, et c’est ce qui importe : que l’échange soit possible.<o:p></o:p>

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    Alors prenez in fine la langue Corse, enracinée dans une forte tradition orale. Voilà qui n’est pas sans évoquer la situation de l’Irlande au moment où Joyce entreprend d’écrire : minoritaire, enfermée dans la domination britannique. Joyce n’écrit pas en gaélique, mais il sait faire chanter sa langue natale dans la langue de l’oppresseur, pliant au passage les règles du roman moderne au grain hérité du plus profond de son histoire. Cette jouissance séminale de la parole à la suture du parlé et de l’écrit, c’est dans son roman qu’il va donc la faire passer, abusant de phonétique, jouant du surgissement du son dans le mot. Lisez-le à haute voix, vous l’entendrez bien, allez ! Mais s’il y a de l’hérétique dans cette langue, c’est bien que son souci d’expérimentation formelle coïncide avec une conception offensive de la vie. Le vieil irlandais si vieux et d’un coup à la pointe de toute modernit酠 C’est cela que l’on entend ici et là dans le corse qui s’écrit aujourd’hui, au-delà du besoin ontologique d’exister par la révolte, dans et par cette formidable cambriole nourrie des rapines des autres possibilités langagières, en tout premier lieu offertes par la vieille langue corse.<o:p></o:p>

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    Mais ne poursuivons pas trop loin ce parallèle entre l’Irlande de Joyce et la Corse d’aujourd’hui. Encore que l’une et l’autre se soient façonnées par une construction identitaire fondée sur l'opposition à la culture qui les dominait. Ici, l’époque n'était guère propice à la liberté artistique, comme en témoignent la censure et l'exil de nombreux écrivains irlandais, de Joyce à Beckett. Ici toujours, la nation prenait ses distances avec ses repères historiques — la langue gaélique, l'Église catholique, un mode de vie rural — pour se réinventer dans un cadre européen et se démarquer du nationalisme violent qui sévissait dans le Nord. C’est peut-être, toute proportion gardée, ce à quoi la Corse opère aujourd’hui : à revisiter son passé pour l’accomplir autrement. Car voici que dans la régulation qui s’opère, le passé fait de nouveau fond sur l’histoire présente. Il n’est que d’évoquer cette coutume corse séculaire : le Chjam’è rispondi. Il y a là, sans doute, encore, une voie que les Corses contemporains n’ont pas fini d’explorer dans leurs œuvres. (voir le très bel article de J.-P. Ceccaldi à ce sujet sur son blog : http://blog.ifrance.com/flicorse).<o:p></o:p>

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    De quoi parlons-nous ? A l’origine d’une joute verbale au cours de laquelle les participants rivalisaient avec des mots scandés a capella. On n’est pas loin du Slam ou du Rap. Impromptu poétique, sur un schéma mélodique répondant à des règles précises avec un contenu ouvert aux débats de société. Nul doute que la Corse tienne là le filon des modernités à venir ! Imaginez : savoir pareillement syncoper son présent, le plier aux contraintes de l’histoire tout en exposant cette dernière à la (petite) frappe de l’actualité. Faire entrer dans l’insolite d’une voix individuelle une réponse sociétale. Pas étonnant, en outre, que le polar y tienne une place de choix, pour toutes les raisons déjà données à son sujet dans ce numéro et pour cette autre qu’il porte, mieux qu’aucun autre genre, lui-même trace de la structure Chjam’è rispondi : et la contrainte des règles du genre et la liberté sans laquelle le chant ne serait qu’une rengaine exténuée.<o:p></o:p>

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    La Corse édite donc. Selon un schéma connu : désertification rurale, migration vers les grands centres urbains. Ainsi, Ajaccio et Bastia, les métropoles, abritent-elles la quasi totalité des éditeurs actuels. Albiana, Alain Piazzola, DCL, Lettres Sud, La Marge, Matina Latina pour la première, Mediterranea, Anima Corsa, Patrice Marzocchi, pour la seconde. Ailleurs ? Rien, sinon les éditions Le Signet, établie à Corte, l’ancienne capitale historique.<o:p></o:p>

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    La Corse édite, du noir. Beaucoup. Avec les éditions Albiana par exemple, qui travaillent une voix corse empreinte d’un blues magistral, ou avec la naissance de ce personnage, le flicorse, qui, mieux qu’aucun autre, porte en lui toute l’ambiguïté du débat corse. Mais ne formalisons rien encore : découvrons !<o:p></o:p>

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    Joël Jégouzo.<o:p></o:p>

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    Découverte de la  littérature polonaise et polonité :<o:p></o:p>

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    La culture est un magnifique espace d’échange dans lequel chacun a quelque chose à apprendre de l’autre. Les échanges sont porteurs de nouvelles richesses que ce soit en littérature, en musique ou dans les arts visuels. La culture est l’essence de notre identité. Elle la perpétue en s’enrichissant. Elle  renforce le  fil ténu entre la Corse et sa diaspora.  L’identité corse est indissociable d’une culture et d’une langue corses. La culture a besoin d’échanges pour exister en se réinventant. Comme l’humanisme, elle  ne peut être enfermée dans l’immobilisme et le  communautarisme. La langue a besoin de la culture pour garder toutes ses richesses et ne pas se perdre pour devenir un patois. Pour sortir la culture corse de la vitrine exotique montrée au tourisme de masse et des stéréotypes véhiculés par un racisme rampant, il faut continuer à  porter notre regard sur le reste du Monde pour que le reste du monde porte un autre regard sur nous. C’est, vous dirait un Corse, chose presque atavique et naturelle pour un insulaire qui, traditionnellement, a  le goût du voyage et le sens de l’hospitalité.

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    L’intérêt porté par la revue Polonaise sur la littérature corse méritait donc que nous parlions de ce pays géographiquement et intellectuellement si proche. Depuis plusieurs années, un événement est organisé en France : les semaines polonaises. La France a, depuis longtemps, entretenu des rapports privilégiés avec la Pologne qui a lutté, pendant des siècles, pour sa liberté. C’est l’occasion de découvrir la richesse littéraire d’un pays qui a donné de grands auteurs dans plusieurs genres et de réentendre les Polonaises de Frédéric Chopin.

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    Sans remonter à la Genèse et en toute modestie de notre part, avant de vous citer, de façon non exhaustive, quelques noms polonais qui ont passé les frontières et conquis une renommée internationale, passons par un peu d’histoire qui peut donner un éclairage sur la culture littéraire polonaise.

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    La « Rzeczpospolita » (ancienne république polonaise) était multireligieuse et multiethnique.  Au XVIIIème siècle, l’asservissement de la Pologne à la Russie va être à l’origine du nationalisme polonais qui atteint son apogée pendant les insurrections « romantiques » et la période dite « des partages », avec le développement des idées nationalistes chez les communautés allemande, ukrainienne, biélorusse, tartare, lituanienne et juive. Les Polonais qui refusaient la collaboration  et l’asservissement, ont choisi l’exil  et/ou  la lutte armée. Un mouvement dit de résistance « organique » préconisait de travailler souterrainement et sur le terrain l’identité polonaise par l’ouverture d’écoles, lorsque la langue était interdite ou encore dans des cercles littéraires. Pour une grande part, cette résistance s’est organisée dans les arts et les lettres. Nombreux furent aussi les peintres qui rendirent hommage à cette culture, en lui restituant un cadre formel.

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    Dans ce contexte, la littérature est devenue un instrument politique et de lutte contre l’oppression, utilisant les métaphores en poésie et les allégories dans le roman. Le héros romantique devenait  héros national, défenseur de la culture et de l’âme polonaises.  Il est resté le héros non-conformiste de la jeunesse polonaise. Il lutte pour la liberté mais aussi  pour des valeurs (religieuses)  et  des idéaux humanistes.  En juillet 2005 , l’éditeur Atlantica a sorti un ouvrage : «  Valeureuse Pologne : ses souvenirs, ses hommes d’état et ses personnalités remarquables » écrit par Laurence Catinot-Crost, historienne et romancière.

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    l'Hymne national

    "La Pologne n'est pas encore morte tant que nous vivons"

    L'histoire de l'hymne national polonais est particulièrement intéressante, jalonnée d'épisodes captivants. C'est dans un manoir de la campagne au nord de la Pologne que naquît l'auteur de son texte, rédigé au mois de juillet 1797, dans une ville lointaine située en terre italienne, étrangère mais amie, qui avait offert son hospitalité aux soldats polonais après le partage de la Pologne par ses voisins. Cet hymne, chanté spontanément sur la mélodie d'une mazurka traditionnelle, d'un jour à l'autre est devenu le chant des Légions polonaises en Italie. En gagnant toujours en popularité parmi les Polonais, cet hymne a survécu avec eux à un siècle et demi de domination étrangère. En 1926 il fut reconnu officiellement comme hymne national.<o:p></o:p>

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    Ce bref rappel insuffisant a pour but de mettre en exergue une généalogie expliquant la prépondérance des thèmes nationaux et patriotiques dans la littérature polonaise. Après des années de soviétisme, la Pologne a rejoint la communauté européenne, dont elle a toujours été un membre important, notamment, dans le domaine culturel.  Nous vous donnons quelques noms et quelques modestes  indications pour susciter  le désir d’aller plus loin dans la découverte des Polonais.

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    Au Panthéon de la littérature polonaise, nous rendons hommage à un grand écrivain philosophe, Witold Gombrowicz et à deux grands poètes : Adam Mickiewicz et Czeslav Milosz.<o:p></o:p>

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    Un grand écrivain et philosophe : Witold  Gombrowicz ( 1904-1969 )

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          Né en 1904 à Maloszyce, il est issu de la noblesse terrienne et donc d’un milieu favorisé.  Il fait des études de droit puis, sans grande conviction, s’installe comme juriste à Varsovie. Il y fréquente le Café littéraire Ziemanska et, en 1933, publie un premier recueil de contes « Mémoire du temps de l’immaturité » ( Barakaï ), mal reçu par la critique. En 1939, il part en Argentine , pour un voyage offert par  l’Union des écrivains polonais. Il y vivra pendant 24 ans. En 1951, il collabore avec la revue de la diaspora polonaise « Kultura » et avec l’institut littéraire de Paris. C’est le début de sa célébrité, qui lui permettra de vivre de son travail d’écrivain à partir de 1955. Après un séjour à Berlin, il se rend à Paris où, en 1964, il rencontre une étudiante canadienne, Rita Labrosse, qu’il épousera. Il s’installe à Vence où il décédera le 24 juillet 1969, année de sa dernière création, une pièce de théâtre intitulée « Opérette ». Dans le genre léger de l’opérette, il traite des sujets lourds de la fin de l’Histoire et du fiasco des idéologies. Gombrowicz a souffert, presque toute sa vie, d’une maladie pulmonaire. Il disait que : «  Le vrai réalisme devant la vie est de savoir que la chose concrète, la vraie réalité, c’est la douleur…Moi, je vois l’univers comme une entité complètement vide, où la seule chose réelle est celle qui fait mal : précisément la douleur. »

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    Bibliographie :

    1933 : « Mémoire du temps de l’immaturité ( Barakaï ) , recueil de contes

    1935 : « Yvonne, princesse de Bourgogne », pièce de théatre, et son premier roman « Ferdydurke »

    1937 : « Les envoutés »,  roman

    1953 : «  Trans-Atlantique », feuilleton dans la revue Kultura, puis roman et une pièce de théâtre « Mariage »

    1955 : « Pornographie », roman

    1961 :  « Cosmos », roman

    De 1957 à 1971 : Journal I, II et III

    1968 « Entretien avec Dominique de Roux » , réédition sous le titre « Testament » en 1977

    1969 : « Operette », pièce de théâtre.

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    L’action, humour et le suspens sont utilisés par Gombrowicz pour être lu par un large lectorat. Ses principaux thèmes,  le ton, l’humour noir, le style baroque apparaissent dès son premier recueil de contes.

    Dans Trans-Atlantique, il pousse  le jeu sur le style  à l’extrême. Il y raconte son arrivée en Argentine  à la veille de la deuxième guerre mondiale, un début réaliste suivi d’une évolution vers le fantastique et même le grotesque. Il caricature la diaspora polonaise, prenant ses distances avec les mythes et les  stéréotypes d’un nationalisme qui étouffe l’individu au nom de l’indépendance de la patrie. Il ne s’agit cependant pas d’un roman blasphématoire contre son peuple et  Gombrowicz prend la précaution de préciser dans la préface : «  Je conviens aussi que « Trans – Atlantique est un navire corsaire qui porte en contrebande un lourd chargement  de dynamite, destiné à faire exploser le sentiment national toujours en vigueur chez nous. Tout en restant Polonais, cherchons à être quelque chose de plus ample et supérieur au Polonais ! ». Sa  vision  apparemment « Nietzschéenne » de la polonité trouve sa signification dans son concept de « forme », thème de son premier ouvrage « Mémoire du temps de l’immaturité ». Pour ce  « palatin de l’antiforme », l’homme n’est jamais authentique et toujours déformé, comme si il jouait derrière un masque,  sans vrai visage.  Sa polonité, selon Joël Jégouzo, s’inscrivait en faux de l’héritage polonais qu’il nommait à juste titre la  « polonitude », concept identitaire qui, selon lui,  enfermait la société polonaise restée tournée vers son passé. « L’homme est à la fois maître et esclave de sa forme », disait-il. L’antiforme Grombrowiczienne est une forme qui s’oppose à la tyrannie du moule social et psychologique imposé à notre immaturité. C’est donc le refus aussi du masque identitaire, le refus de l’enfermement et le « choix » de chercher librement « quelque chose de plus ample et supérieur » à la forme polonaise, tout en restant polonais.  Ce n’est pas une trahison , c’est une ouverture sur l’avenir. Ce roman « Trans-Atlantique » , mal compris, est l’ouvrage le plus polonais de son auteur., alors qu’il lui a valu d’être regardé comme un « déserteur de la cause polonaise », pour certains, et un «  provocateur prétentieux » pour d’autres. Quant à lui, il aimait à dire de lui : « Je suis un humoriste, un pitre, un équilibriste.. » et de nous tous : « L’homme est un éternel acteur.. ». Un autre auteur contemporain vivant, Slawomir Mrozek, qui a aussi écrit sous le pseudo de Diaman Prutus, évoque dans ses écrits un monde déformé par une schématisation dans laquelle la forme prend le dessus sur le sens.  Il  crée des personnages qui sont des schémas humains ( Mrozek est né en 1930 , ses œuvres dramatiques sont traduites et jouées dans de nombreux pays ).

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    Dans Cosmos et Pornographie, il y a aussi du suspens. Le style devient plus naturel, mais l’histoire est plus étrange, avec des côtés malsains et pervers. C’est du roman noir existentiel. « Pornographie » est un titre en trompe l’œil : derrière la couverture, il n’y a pas de photo X  ou d’érotisme.

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    Ferdydurke est un collage de nouvelles avec une unicité de thème : l’imitation, le désir de ressembler à autrui et de rendre autrui comme soi-même, et aussi désir d’échapper à autrui, de fuir, de rester soi-même. . « Les envoûtés » est un roman feuilleton fantastique où tout tourne autour d’un chiffon qui bouge tout seul.

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    Du 27 avril au 25 mai 1969, Gombrowicz a livré sa vision sur l’évolution de la philosophie du 20ème siècle. Ses propos ont fait l’objet d’une publication après son décès sous le titre de « cours de philosophie en 6 heures un quart », donnés à son épouse et à Dominique de Roux, co-auteur de « Testament ». Il s’agit d’un opus court mais dense : une sorte d’anti-manuel de philosophie  « pro philosophique ». Editions Rivages poche. A lire !

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    Gombrowicz a toujours dénoncé la routine et la paresse intellectuelle. Il refusait de se laisser influencer par les modes et nous exhorte à penser librement.  Ces livres restent à la portée de tous et, pour la plupart, ont fait l’objet d’édition en poche chez Gallimard.  Le Journal écrit entre 1957 et 1971 s’adresse à ceux qui veulent aller plus loin dans la connaissance de ce penseur moderne.

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    Nota : Il faut aussi citer, comme auteur polonais important pour mieux comprendre la polonité,   Jean - Chrysostome PASEK et l’ouvrage de cet auteur «  Mémoires de Jean-Chrysostome PASEK, gentilhomme polonais 1656-1688 » édité en France. C’était le livre de chevet de Gombrowicz et selon Joël Jégouzo  « un superbe ouvrage du baroque polonais, une tradition littéraire qui remonte à Rabelais ».

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    Deux grands poètes : Adam Mickiewicz et Czeslav MILOSZ

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       1°/ Adam Mickiewicz (1798 – 1855), héros national:

             En 2005, les Polonais ont commémoré le 150ème anniversaire de sa mort. Il s’agit d’un poète emblématique dans le Panthéon de la culture polonaise. D’origine lituanienne et héritier d’une tradition pluriculturelle, il est le chef de file des Romantiques. En Pologne, il a fait naître une conscience nationale qui a, sans doute, ouvert la voie à l’indépendance dans une Pologne privée de liberté et distribuée entre trois grandes puissances. Il met le concept de « Peuple » au dessus de celui de « Nation »  et la liberté au dessus des appartenances.  Pour lui, la Pologne devait être le « Messie des nations » et, devenue indépendante, concourir à l’unification des peuples européens.  Il a passé la plus grande partie de sa vie en exil  (pendant 23 ans, à Paris), tout en combattant et en essayant d’organiser le résistance et la reconquête.

             Il a écrit une œuvre majeure : «  Les Aïeux », qui a déclenché les manifestations d’Octobre 1956 et inspiré celles de mars 1968 puis le mouvement Solidarnosc.

             Il laisse une œuvre toujours rayonnante et un message universel de liberté, tout en affirmant son enracinement profond en Lituanie.

         

             Né en 1798 à Zaosie ( actuelle Biélorussie ).  En 1812, sa famille héberge une partie de l’armée de Napoléon placée sous le commandement de Jérôme, Roi de Naples.  Etudiant à Vilnius, il participe à la fondation des organisations de la jeunesse progressiste et patriote : Les Philomates et les Philarètes. En 1815, il est nommé professeur de littérature latine, histoire et droit. En 1823,  il est arrêté comme membre des Philomates, incarcéré puis interdit de séjour en Lituanie et sur les anciens territoires polonais. Après 5 ans passés en Russie où il rencontre Bestuzev, Rylejev (poètes dékabristes ) et Pouchkine, il voyage et rencontre Goethe à Weimar. Il s’installe en France en 1832.Pendant son long séjour en France, il a une intense activité littéraire et occupe plusieurs fonctions, notamment, en 1840, il obtient une chaire de littérature slave au Collège de France où il côtoie Edgar Quinet et Jules Michelet. Il en fut exclu car ses cours tournaient à l’émeute. « En exil et pélerin » ( « exult et pérégrinus », premiers mots de la première grande chronique polonaise qui fonde le récit polonais et  a pour auteur un moine français, Gallus Anonymus) : formule reprise par Mickiewicz  qui  reste actif dans la résistance polonaise.  En 1855, il se rend en Turquie pour soutenir les « légions polonaises »  dont la création a été négociée entre le Prince Czartoryski et Napoléon III. Il y meurt du choléra. Inhumé d’abord au cimetière polonais de Montmorency, son corps a été rapatrié à Cracovie en 1890. C’était un innovateur qui travaillait la langue polonaise dans ses écrits allant jusqu’à bouleverser la métrique du vers polonais pour lui donner d’autres rythmes.   

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             «  Le pays d’enfance. Il restera à jamais saint et pur comme le premier amour » (A.Mickiewicz, épilogue du poème épique « Pan Tadeusz », 1834  dont s’inspira  Andrezj Wajda pour son film « Pan Tadeuz, quand Napoléon traversait le Niemen , sorti en 1999 )

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    2°/  Czeslav MILOSZ ( 1911 – 2004 )

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          Il est né le 30 juin 1911 à Szetejnie ( en Lituanie comme Mickiewicz ). Il décède le 14 Août 2004 à Cracovie , à l’âge de 93 ans. Il a vécu les guerres et  les totalitarismes qui l’ont jeté sur les routes de l’exil, avec des retours toujours éphémères.  Sa poésie est l’expression de cette émigration forcée qu’il ressentait comme un bannissement « spirituel ». « Chassé du paradis », il souffrait d’être la victime l’incompréhension  « de simples mangeurs de pain ».  Sa longue vie « d’éternel pèlerin »  l’a façonné et a fait de lui un défenseur tenace de la  pensée libre. Il était marxiste dans la Pologne « bourgeoise » et disait non aux communistes de la Pologne « populaire ».  Il était athé mais regrettait le perte de l’imagination religieuse. Il était hostile à la « Polonité » par opposition au « zèle patriotique », tout en affirmant son attachement à sa langue et à son pays natal. Tout en exprimant  cette liberté de pensée par de l’inconstance et des contradictions dans ses choix politiques et religieux, il avait  un projet poétique «poétiser la réalité » et était en quête du mystère de l’existence. Si, poète maudit, il a percé ce mystère, il ne l’a pas divulgué avant de mourir. Il laisse une œuvre variée dans le style et multiple dans la forme. 

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    C’est par « La pensée captive »,  premier livre publié à l’Etranger qu’il est connu du lectorat occidental en 1953. Par la suite, il est récompensé par le Prix littéraire européen avec « La prise du pouvoir ». En 1997, il obtient le prix Nike avec la parution de « Chien mandarin ». Il faut citer ses poèmes dont « Anthologie personnelle » paru en 1998 et ses essais dont « La recherche de la patrie » en 1992.

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    La Pologne est la patrie de deux cinéastes célèbres : Roman Polanski et Andrzej Wajda<o:p></o:p>

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    1°/ Roman Polanski : <o:p></o:p>

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          Roman Polanski est né à Paris en 1933 de son vrai nom « Raymond Liebling ».  Il rentre  avec ses parents en Pologne où il se trouve lors de l’invasion nazie en 1939. Il  s’évade du Ghetto de Cracovie et échappe aux camps de la mort où sa mère disparaîtra. Il retrouve son père après la guerre. Il  fréquente une école des Beaux arts, et en 1950  tourne dans quelques films et entre à l’école du cinéma de Lodz. Il réalise d’abord des courts métrages, puis, son premier long métrage en 1962 «  Le couteau dans l’eau ». Il séjourne en Angleterre où il réalise  « Répulsion », « L’étrange cul de sac » et « Le bal des Vampires ».. En 1968, il sort son premier film hollywoodien  « Rosemary’s Baby ». L’année suivante , son épouse Sharon Tate est assassinée sauvagement par le tueur en série Charles Manson, alors qu’elle est enceinte de 8 mois. Il retourne en Europe où il tourne Macbeth. En 1974, il obtient un grand succès avec « Chinatown ».  Il tourne ensuite Tess, Pirates, la Neuvième porte, la jeune fille et la Mort.,  Pianiste. En 2005, son dernier film est une adaptation de « Oliver Twist » de Charles Dickens.

          Avec  Le Pianiste, sorti en 2003, il évoque l’occupation nazie en Pologne  et le ghetto de Varsovie. Il a obtenu la Plame d’or à Cannes. Polanski est aussi acteur et a joué dans de nombreux longs métrages réalisés ou non par lui. Il a notamment fait l’acteur dans des films de Andrzej Wajda comme « Zemsta » ( La vengeance) dans lequel il joue le personnage de Papkin en 2002, mais aussi « Génération une » en 1955 dans le rôle de « Mundek », ou encore« Dudzio » dans « Do widzenia, do jutra » en 1960.

         

         

    2°/ Andrzej Wajda :<o:p></o:p>

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          Andrzej Wajda est né en 1926 à Suwalki.  Il a fait des études aux Beaux Arts de Cracovie et ensuite, comme Polanski, à l’Ecole Supérieure de Cinématographie de Lodz. Il a occupé plusieurs fonctions dans des instances du Cinéma polonais dont il s’est fait le défenseur et, en 1988, on le retrouve aux côtés de L. Walesa dans Solidarnosc. C’est un novateur dans le domaine de l’expression cinématographique et un intellectuel qui s’inspire de la peinture et de la littérature polonaises et étrangères. On retrouve dans son œuvre les thèmes du romantisme  ( héroïsme, vertus morales..) et de l’humanisme ( la mort, l’amour, la haine..), dans un style fait de baroque, de lyrisme et de métaphore poétique. Il met en scène, sous  son éclairage,  sa vision personnelle et artistique de l’histoire de la Pologne mais aussi de la tradition polonaise et de la polonité. En 1950, il participe à la création du mouvement appelé « Ecole polonaise du cinéma » qui va faire connaître le cinéma polonais dans le monde entier. En 1955, il débute avec la réalisation de « Pokolénie » (la même année Roman Polanski réalise  « La bicyclette », film dans lequel il joue lui-même la victime).  Quelques titres de films à revoir :  Kanal  1957,   Cendres et diamants  1958, L’homme de marbre 1976, l’homme de fer 1981 Danton 1982. Il a obtenu la Palme d’or à Cannes pour l’Homme de fer , le lion d’or à Venise pour l’ensemble de son œuvre et d’autres distinctions dont la légion d’honneur en France.

          Andrzej Wajda a fait l’adaptation cinématographique  de plusieurs œuvres de la littérature polonaise dont « Pan Tadeusz » , film sorti en 1999.

           

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    La « Noire » polonaise :<o:p></o:p>

     

            Dans les année 1980 , on assiste à un retour à l’affabulation dans la littérature et, dans les années 1990 , à l’intrigue.  Des auteurs polonais apparaissent dans le roman noir, le polar et le thriller.   Nous avons noté l’existence en France d’une librairie polonaise avec une boutique en ligne : Librairie franco-polonaise LEKTURA, 24 rue Saint Jacques à Lille (59). Cette librairie vous propose des ouvrages en polonais ou traduits.

             Nous avons relevé des auteurs connus comme Alex Joe, Joanna Chmivlewska, Jaroslav Miklaszeask, Marek Krajewski ...

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             Nous avons relevé l’ouvrage de l’auteur polonais Manuela  Gretkowska  « Tarot Paryski », dans lequel l’auteur vous fait suivre  une piste spirituelle et mystique dans un labyrinthe culturel où vous rencontrerez le Tarot, l’humour, le sexe et la Kabbale.

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            Du 10 au 12 Novembre 2006 à Berlin, aura lieu le 3ème colloque  France – Allemagne - Pologne sur le polar.<o:p></o:p>

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  • Cœur de rocker  et «  doigts écorchés » :

    « Les doigts écorchés », une histoire à fleur de peau. Sylvie  Robic nous livre l’intimité de la douleur d’un deuil avec le doigté d’une musicienne, le balancer et rouler d’une écriture  au rythme tendu qui fait ressurgir l’esprit « Rock n Roll » toujours vivant d’une époque pas si lointaine. 

    A la fin … au début… non à la fin … non au début et à la fin du roman, un adulte suit la tournée du groupe Hoggboy (venu de Sheffield). Entre les deux, il  renoue avec son passé sans savoir par où commencer. Alors, ses premiers mots sont « Il y a forcément plusieurs débuts » et le premier début s’impose chronologiquement, « …  s’étend et se dilue sur une quinzaine d’années, du milieu des années 60 au début des années 80. Il met en scène deux garçons et leur mère, en Province, au sud-est de la France, sur les contreforts du Vercors ? » . Une enfance ordinaire provinciale : « … Une mère très jeune un peu débordée, des paysages de basse montagne. Les deux couleurs de ce temps – là sont le vert et le blanc mais la musique aussi est une couleur, la plus brillante, la plus intense ».  Cette mère était tombée amoureuse d’un saisonnier au début de l’été 62. Le narrateur naissait un an plus tard et, ensuite vient la naissance de son frère qui coïncide avec l’abandon par le père qui leur  a laissé une seule chose : le goût de la musique. « Dans la maison, de la musique partout, toute le temps, pour combler son absence ». Et puis en 1978, les réunions d’adolescents dans une chambre pour écouter des disques  de LedZep jusqu’aux Sex Pistol… Anarchy in the U.K  ou bien  No more Heroes et les Stranglers répliquant à David Bowie. Le rock emplissait la vie quand sont venues les années 80 « … une ambiance beatnik revue et corrigée par le tranchant rouge, noir du punk ».

    C’était le temps de l’adolescence et de sa révolte : «  Heureusement qu’il y a les copains. Sans eux, on  serait déjà mort. Parce que les couleurs, les odeurs, les conforts de l’enfance ont brusquement perdu tout intérêt à nos yeux et ça s’est fait d’un coup, sans même qu’on s’en aperçoive. Ce sentiment soudain insupportable de vivre dans un pot de chambre, au trou du cul du monde, sous une chape de plomb de montagnes … Passer au Punk, aux Sex Pistol, aux Stranglers, aux Cash,… c’est passer à l’insurrection, à l’intensité électrique. »  et  « Le rock a été inventé pour sortir les petits garçons des prisons des caresses maternelles. Le rock est une guerre inévitable pour échapper à sa mère ». L’important, c’était la musique !  Le rock qui écorchait les doigts sur les cordes d’une guitare électrique.  Le « tout pour la musique » des écorchés vifs de l’adolescence… Les vibrations de l’être… Les révoltes… La guerre du Vietnam, les bombes américaines au nom de fille tueuse « Daisy Cutter », U2 devenu mythique...

    Autre début : la mort de Maurice Pialat et l’hommage rendu à l’amour du cinéaste pour les apprentis rebelles en motocyclette. Le 11 janvier 2003, pour le narrateur, tout recommence. «  Cette nuit-là, j’ai rêvé d’accidents, d’accidents de mobylette, et au réveil je n’ai pas pu m’empêcher de songer très fort à toi. ». Flash back : la présence du frère qui voulait une mobylette. Avec sa MBK, il avait pu frimer jusqu’à sa mort bête, une sortie de route, un arrêt de vie…. Et un « cœur renversé » de rocker. L’entrée brutale dans le monde des adultes. Vingt ans « d’erreur, de fatigue et d’exil », jusqu’à un concert du groupe Hoggboy.  Le riff de  la guitare… L’esprit Rock n roll… Les vibrations de l’être…  Le goût proustien de la musique, Joy Division, Marquis de Sade… et les autres. Mais avant ,  l’enfance coulait ses jours. Les deux frères écoutaient  la voix grave de Nico et The Velvet Underground, Gainsbourg, Birkin , Nino Ferrer et sa chanson pour Nathalie, le prénom de leur mère qui a affublé le chanteur de surnoms affectueux : « Nono Nano mon Nanounet »…

    Comment raconter une vie ? Doit-on commencer par le début et finir par la fin. On dit que tout commence et tout finit par des chansons.  Le narrateur a raison : Il y a forcément plusieurs débuts à l’histoire d’une vie. Le mot fin ne peut être que mortel… Comment accepter la mort d’un proche ? Le narrateur a mis vingt ans avant de dire : « J’ai perdu un frère, il est mort à quinze ans dans un accident de mobylette. ». Mais ce  n’est pas un constat définitif. Au fond de lui, il cherche encore ce frère et  reste à l’affût du moindre signe dans la vie. «  Il y a des signes dans la vie. Il faut y croire », derniers mots d’espoir d’un autre début pour que rien ne soit définitif. A partir des mêmes notes, la musique parle plusieurs langues mais chacune s’adresse directement à notre être le plus profond.  Je me souviens du récit d’une femme corse qui avait perdu son jeune garçon. Lors de la cérémonie religieuse, un cœur de voix d’hommes avait chanté « Diu di Salve Regina… ».  Cette mère a reçu ce chant sacré comme un signe de vie. Grâce à cette musique, son fils n’était plus mort mais s’envolait, et cette image l’a apaisée. Il n’y avait plus la mort entre eux. Elle ressentait à nouveau la présence de son fils devenue son protecteur. Nietzsche a exprimé son point de vue  philosophique sur l’importance existentielle de la musique. Le Rock n Roll et la musique populaire illustrent, en sortant de l’élitisme, ce que, pianiste et mélomane pétri de grande musique, il écrivait : « La vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil. »

    Sylvie Robic, maître de conférences à Paris X,  a été publiée pour la première fois en 1999. Il s’agissait d’un essai « Le salut par l’excès ». Et puis en 2003, il y a eu son  premier roman « Une fille gentille » (Editions PUF). Elle a ensuite participé à une écriture collective eux Editions verticales en 2004 : « Tout sera comme avant », des nouvelles autour des chansons de Dominique A.  Avec « Les doigts écorchés », elle nous a composé, avec grâce, un roman à la fois court et dense. Il s’agit d’une chronique intimiste de la Rock n Roll attitude qui sauve de l’autisme une adolescence en rupture avec le monde de l’enfance et en révolte contre les adultes : posters collés aux murs des chambres, look déjanté avec épingles à nourrice, vinyle des 45 ou 33 tours, plastic des minijupes, tournée avec les copains… Dans son premier Roman, la « fille gentille » est rattrapée par un amour perdu dont le film s’est estompé, ne livrant que des flashes et des images incertaines. Dans « Les doigts écorchés », le narrateur masculin renoue avec son adolescence et  la mémoire de son jeune frère décédé à 15 ans. Dans les deux romans, les souvenirs hantent les héros.  Le rapport  avec la musique y est sensuel et charnel.

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  • Jean-René Augè vit dans la région de Perpignan.  Lorsqu’on le rencontre, on s’attend  à ce  qu’il nous chante « que la montagne est belle … », avec son  « vrai » air de Jean Ferrat.  Mais c’est avec sa plume taillée dans le rabassou (cep de vigne en patois catalan) qu’il fait chanter les mots par grappes et qu’il nous trace le récit de Taïeb entre les rangées de vignes, lentement pour le bonifier comme du bon vin.  Trouillas est  un patelin viticole pas très loin de Perpignan, planté au milieu de mère Nature, toujours présente et vivante, avec sa « peau d’herbes sauvages », ses « naissances» de fruits et légumes dans les potagers sous « les yeux des maisons, timides »… Un coin du Sud de la France où le soleil « brûlait pareillement espagnols, gitans, arabes ou catalans ».   

    Taïeb y arrive à 15 ans avec sa famille. Son père y est embauché comme ouvrier agricole après une période de chômage dans la banlieue parisienne. Taïeb est un môme des cités banlieusardes avec des parents d’un « pays avant la France …  un pays qui portait la mer en chapeau et le désert pour chaussures, avec  des écritures comme des pas de mouches ivres qui allaient de droite à gauche » : l’Algérie. Il ne partage pas leur nostalgie ni leur Dieu qui l’empêche d’être ce qu’il est : un Français. « Mon père, dit-il,  parle de ses racines, des vieux de là-bas, de tous ceux qui ont fait notre histoire et j’ai envie de lui crier que je me fous de la graine… C’est là où elle tombe qui a de l’importance. Là où elle pousse et j’ai poussé ici. En France. »  Après quelques larcins commis plus par désoeuvrement que par cupidité, il découvre, dans un petit village du Sud de la France, la mer, la terre, l’amitié   et l’amour.  Il s’émerveille devant cette mer qu’il croyait immobile, comme sur les cartes postales,  alors qu’elle bouge et qu’elle chante : «  un drap tendu entre deux montagnes, bien accroché aux roches, avec un vent, dessous, prisonnier entre la terre et la toile, qui essaie de s’enfuir. Il souffle. Inutile. Le drap se gonfle. Il s’arrête. Le drap se creuse ».

    A Trouillas, malgré sa peau un peu plus marron que les autres,  le jeune beur décide qu’il est catalan et se baptise « Taïeb de Trouillas », une association, presque un titre de noblesse terrienne,  qui devrait l’enraciner  après avoir vécu dans une cité où le béton imperméable entretient le déracinement. Dés son arrivée, il rencontre son nouvel ami : Paulo , le fils du mas d’Avall, « un brave petit pas très porté sur les livres mais qui sait reconnaître le mildiou, la tavelure ou la cloque ». Et puis, apparaît son premier grand amour : Annie. Elle est grande, belle et fille d’un riche vigneron. Taïeb est petit, maigre et pauvre,  mais il est « de la race de ceux qui rêve grand » et il nous dit : «   Je suis pauvre, je rêve riche. Maigre, je rêve gros et même un peu costaud. Ca ne gâcherait pas. Et puis, je me réveille. Forcément, impossible de dormir une vie.» En lui offrant des fleurs volées, l’adolescent va-t-il conquérir sa bien-aimée, promise à Paulo?

    Il faudra lire le roman de Jean-René Augé pour le savoir.  Ce nouvel auteur du terroir catalan aborde, de façon originale, le sujet des jeunes beurs des banlieues parisiennes, mais aussi les mondes étrangers qui se côtoient : celui de la ville et de la campagne, celui des adultes et des enfants, celui des riches et des pauvres. Taïeb est l’un de ces jeunes beurs, étranger dans sa famille, étranger dans sa nationalité française, étranger dans la campagne catalane, étranger dans le monde des adultes, étranger dans sa pauvret酠 Il rêve sa vie, au lieu de la vivre.

    Trouillas est un village du Languedoc – Roussillon dans le département des Pyrénées orientales. Anciennement « Truliars »( An 844), l’étymologie de ce lieu fait polémique. Trouillas ex-Trullars pourrait venir de la racine catalane « « Trullas » ou « Trouill » du latin torcular, torcularis qui désignait un pressoir. Le mot s’est transformé en trohl ou trull qui est un pressoir ou un fouloir à raison. Mais pour d’autres, il s’agissait d’un pressoir à olives et le moulin à huile placé en décoration sur un parking pourrait appuyer cette thèse, comme, du reste le blason de Trouillas sur lequel quatre cercles symbolisent des pressoirs à olives. Le mot trull viendrait alors du latin torcu signifiant moulin à huile. L’orthographe du mot a varié selon les époques , passant de Truliares (18ème) à Trullas (1091), Trulares (1188), Locus de Trullares (1835), Trullas (1441), et  enfin Trouillas en 1742.  Mais ce n’est pas tout, « trulla » , toujours en latin, signifie « cuvette », vase à puiser le vin…

    Situé dans les Aspres ( qui signifie « sec et caillouteux, âpre en catalan), ce village du contrefort des Pyrénées est  entre la mer et la montagne, avec des alentours entièrement plantés de vignes et où l’on découvre plusieurs mas dont les plus importants sont le Mas Deu (ancienne commanderie des Templiers puis centre d’un important domaine viticole appartenant à la famille Durand avant d’être morcelé au 20ème siècle), le Mas de Canterrane ( du nom de la rivière qui traverse le village et qui ne coule que lors de fortes pluies),  et le Mas Conte. Toute l’histoire de Trouillas est liée à la vigne introduite par les Grecques au 13ème siècle avant J.C . C’est là qu’est né le Vin doux naturel au 13ème siècle. On y a soigné des cépages blancs (macabeu, grenache blanc et gris) et des rouges (syrah, grenache noir, carignan, mourvèdre et cabernet sauvignon) puis au 20ème siècle, est apparu le chasselas.

    Nul doute que Jean-René Augé est du coin et qu’il sait reconnaître le mildiou, la tavelure et la cloque. Nul doute aussi qu’il aime Trouillas qui nous vaut quelques beaux passages avec un lyrisme sans emphase. Il écrit sans phraséologie, donnant ainsi au personnage de Taïeb toute  son épaisseur dans le « je » crédible du héros narrateur. Son livre a été d’abord édité par Les Editions Manuscrit qui ont accepté la résiliation du contrat d’édition et il est donc propriétaire des droits d’exploitation, de diffusion et d’adaptation audiovisuelle de « Taïeb de Trouillas » que l’on peut trouver à la FNAC de Perpignan et à la Librairie Privat, 10 rue du docteur Pous,  toujours  à Perpignan. 

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