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Voyage en Croatie
Voyage en Croatie et escapades en Bosnie Herzégovine et au Montenegro :<o:p></o:p>
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Bien que faisant partie dentités diverses plus vastes, la Croatie a réussi à préserver son identité. Sa culture se présente comme une mosaïque des différentes influences au carrefour de plusieurs civilisations. Un séjour dans ce pays indépendant, au seuil de lUnion européenne, est loccasion de découvrir des paysages à la fois uniques et proches de la Corse mais aussi son riche héritage culturel longtemps occulté sous différentes identités dominatrices.
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En Corse le CCU présidé par Ghjacumu Thiers a organisé une rencontre avec la littérature Croate en présence de Drazen Kutunaric, philosophe et poète, né à Zagreb. Sur le site de lAdecec, vous pouvez retrouver un article sur cette rencontre sous le titre « Du côté de Corti » avec en prime des poèmes de Katunaric traduits en corse par Maria Anna Versini. A Ajaccio, le 1er avril 2005, au cours dune cérémonie, à loccasion de sa visite en Corse, lAmbassadeur de Croatie en France , M. Bozidar Gagro, a décoré de lOrdre de lEtoile du matin ( à leffigie de Katarina Zrinski), au nom du Président de la République croate ( M. Stipe Mesic), Mme Yolande Tabak-Raibaldi, Présidente de lassociation France-Croatie-Corsica, pour son action en faveur de lamitié et des échanges culturels entre la Croatie et la Corse ainsi que son engagement humanitaire en faveur des populations croates pendant la guerre de 1991.
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Depuis lémission « Des racines et des ailes » consacrée à Dubrovnik, la Croatie est devenue une destination de vacances pour les Français. Certes ce pays ne décevra pas les photographes, les sportifs et les adeptes de la bronzette en bord de mer. Il serait dommage toutefois de passer à côté de son histoire et de ne pas sintéresser à la culture de cette « Autre Europe », pour reprendre lexpression trouvée dans le titre du livre écrit par Pedrag Matvejevitch, écrivain né de père russe et de mère croate : « Epistolaire de lAutre Europe », traduit en français aux Editions Fayard. Il sagit dun recueil de lettres ouvertes dont la lecture nest absolument pas ennuyeuse et qui donne des fragments de la vie intellectuelle sous le régime soviétique. Lauteur, dans son combat contre la censure et la répression idéologique, nous fait part de ses réflexions et de ses voyages à travers différents pays de lEst, de lété 1972 jusquau 3 avril 1992.
Les escales de ce voyage littéraire sont des étapes dans lhistoire de cette « Autre Europe » et de sa marche vers la liberté avec des moments dactualité qui, au fil du temps, expliquent lévolution et les ruptures de cette vaste partie du monde où les nations, les races, les religions toutes les influences convergent.
La quatrième page de couverture reprend deux extraits :
- un extrait dune lettre à Mickhaïl Gorbatchev : « Quel sera le nouvel Etat russe : populiste et traditionnel comme auparavant ou démocratique et moderne, orthodoxe ou schismatique à la fois, plus blanc que rouge, moins slavophile quoccidentaliste, aussi asiatique queuropéen, davantage « une Russie que la raison ne saurait embrasser » et « en laquelle on peut seulement croire » (Tioutchev) , ou bien cette autre Russie « robuste et au gros cul » qua chanté Alexandre Block, avec le christ ou sans la croix ? Quelle quelle soit, elle devra compter avec tout ce que lui laisse lUnion soviétique, tout ce, aussi, dont celle-ci la privée, peut-être à jamais. »
- un extrait de la lettre « Sur le mal sidentité » à Czeslaw Milosz et à François Fetjo : « Il serait souhaitable que lEurope à venir fût moins auro centriste que celle du passé, plus ouverte au reste du monde que lEurope colonialiste, moins égoïste que lEurope des nations, plus consciente aussi de son « esprit européen » et moins portée à laméricanisation. Il serait utopique de sattendre à ce quelle devienne, dans un temps prévisible, plus culturelle que commerciale, moins communautaire que cosmopolite, plus compréhensive quarrogante, moins orgueilleuse quaccueillante, plus encline à laction quà la rhétorique et, en fin de compte, pourquoi pas, un peu plus socialiste à visage humain ou moins capitaliste sans visage. »
Dans cette lettre sur le mal de lidentité, il écrit : « La définition de lidentité suppose une altérité : lexistence de lautre, le « regard dautrui ». Il met aussi en garde : « Lidentité au sens étroit du mot risque de devenir un nouveau joujou national » Matjevevitch sest donné comme ligne de conduite la défense de la libre pensée, de la libre expression et du droit à la différence, tout en mettant en garde contre les dérives nationalistes. Bien que censuré, il na pas connu la prison, avouant que la situation était plus favorable en Yougoslavie que dans les autres pays de lEst. Il ajoute que le pouvoir sévissait plus particulièrement contre le nationalisme séparatiste et quil nétait nullement nationaliste. Il précise sur lui-même :
« Au cours des années soixante et dix, je fus confronté aux conséquences des Goulags. Je fis quatre voyages en URSS et appris quel avait été le sort de membres de ma famille la plus proche. Ces découvertes renforcèrent mes convictions et encouragèrent mes refus. Ne voulant pas me conformer à la ligne officielle ni soutenir les particularismes nationaux, je me rapprochais des philosophes de lEcole de Korgula réunis autour de la revue zagréboise « Praxis » qui critiquait également les staliniens et les nationalistes, les déformateurs de la théorie et de la pratique, tant soviétiques que yougoslaves ».
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Le livre souvre à Zagreb en novembre 1970 sur lévocation du manuscrit « 7000 jours en Sibérie » de Karlo Steiner et sur une lettre écrite à Leonid Brejnev au printemps 1971 pour la libération de André Siniaski et Iouri Daniel qui firent paraître des livres sous des pseudonymes (respectivement Abraham Terz et Nikolaï Arjjak) . Le 28 juin 1972, lauteur était à Moscou avec la délégation de lUnion des écrivains de Yougoslavie et, à son arrivée, il se demande ce qui reste de russe dans cette ville, dans la mesure où elle est devenue soviétique. Le 3 avril 1992, pour la dernière lettre, il se trouve à Zagreb où Karlo Steiner vient de mourir, après avoir séjourné au service de gériatrie de Vrapce, un mouroir doù ses amis lont sorti pour quil puisse mourir dignement chez lui. Celui-ci est lauteur dun ouvrage sur les goulags écrit avant celui de Soljenitsine, sans bénéficier de la même diffusion.
Dans le premier chapitre intitulé « Une bouteille à la mer », lorsquil nest pas à Zagreb, Matvejevitch voyage dans les grandes villes comme Moscou, Leningrad, Odessa (où est né son père), Erevan en Arménie (où il se lie damitié avec la poétesse Metaxe qui lui parle du génocide de 1915 ), Tbilissi et Gori (fief de Staline en Géorgie), Kiev Le deuxième chapitre sintitule « Exercices de morale » en référence au recueil de soixante-cinq lettres ouvertes quil avait écrites et qui sont parues à Belgrade en 1985. Les deux derniers chapitres sintitulent « Héroïdes » et « Epitaphes ». Lauteur, spécialiste des questions de dissidence dans les cultures et littératures dEurope orientale, professeur de littérature française à luniversité de Zagreb et professeur invité à la Sorbonne nouvelle de Paris (où il enseigne les littératures slaves) évoque à travers ses lettres ouvertes et ses réflexions des faits mais aussi les personnalités les plus diverses qui ont traversé lhistoire de cette Autre Europe. Vous y trouverez des grands noms de la politique et de la culture.
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Dans la grande librairie de Dubrovnik, située dans la rue principale qui relie la « porte de la terre » à la « porte de la mer » de la vieille ville fortifiée, avec laide de notre guide Vesna, nous avons choisi de découvrir le prix Nobel croate : Ivo Andric.
La librairie ne disposait que de la version française dun recueil intitulé « Contes de la solitude » préfacé par Pedrag Matvejevitch (incontournable lorsquil sagit de littérature slave). La préface biographique est intitulée « Ivo Andric entre lOccident et lOrient ». Reprenant la formule schismatique de Miroslav Krleza (autre écrivain croate traduit en français) « Ni Rome ni Bysance », Pedrag Matvejevitch écrit ; « Ivo Andric regardait à la fois Bysance et Rome, sans perdre de vue lislam, lEst et lOuest, lEurope et « lAutre Europe », et plus particulièrement les Balkans appartenant à lune et à lautre ». Il ajoute ; « Croate par son origine et catholique par sa religion, Serbe par son choix et aussi dadoption, Bosniaque de naissance et par ses racines, Yougoslave par sa détermination et son appartenance, non seulement nationale ou politique. Il nétait guère facile de porter toutes ces différences dans le pays où il était né et où il avait vécu. Les nationalistes croates lont accusé de trahir sa propre nation ; les nationalistes serbes se son efforcés de le « serbiser » entièrement, sans tenir compte des différences que relèvent son origine et son parcours ; les nationalistes bosniaques de confession musulmane lui reprochaient la description des supplices que la population chrétienne a soufferts sous loppression turque oublient ainsi leur propre origine slave Que reste-t-il, à part un masque, à un homme qui devait déjà porter le lourd fardeau de son propre génie à celui qui était peut-être le plus grand écrivain né , au cours de ces derniers siècles, dans les Balkans. »
Ivo Andric est mort le 13 mars 1975. Il avait reçu le prix Nobel de littérature en 1961. Comme « Les contes de la solitude », son roman « Le pont sur la Drina » (Na Drini cuprija) se trouve en livre de poche n° 3321 Biblio ( prix de 6, 10 euros). La postface est de .. Matvejevitch, bien sûr ! Le pont de la Drina relie les rives entre Serbie et Bosnie, Orient et Occident . Il se trouve à Visegrad où se côtoient, depuis le 16ème siècle, chrétiens, juifs, musulmans de Turquie ou « islamisés ». Cest là que Andric a fait ses premiers pas et il a écrit : « Aux instants où me fatiguait et mempoisonnait un monde dans lequel je vivais par un mauvais hasard et miracle me maintenais en vie, lorsque lhorizon sassombrissait et que vacillait la direction, jétendais alors pieusement devant moi, tel un croyant son tapis de prière, le dur sentier, misérable, sublime de Visegrad, qui apaise toute douleur et efface toute souffrance, car il les contient toutes en lui et toutes les surplombe » ( extrait dun texte repris dans la préface des Contes de la Solitude).
A Dubrovnik, nous avons donc trouvé une version française des contes de la solitude (édition « Lesprit des péninsules », éditeur installé 4 rue Trousseau à Paris 11ème, qui a une collection « Balkaniques » dirigé par Eric Naulleau). Ce recueil avait pour premier titre « La Maison isolée », ouvrage complété par deux textes et un portrait de la ville de Sarajevo sous le titre français. Matvejevitch, dans la préface, nous présente Ivo Andric, comme un écrivain de génie timide et ayant pour ligne de conduite la modestie. Dans son discours prononcé lors de lattribution du prix Nobel , Ivo Andric indiquait comme modèle narratif celui qui « s applique à linstar de la légendaire et disserte Schéhérazade à faire patienter le bourreau, à suspendre linévitable arrêt de mort et à prolonger lillusion de la vie et de la durée. » Il a su européaniser la narration orientale « alliant un fatalisme venu des Mille et Une Nuits à une analyse psychologique moderne », selon les commentaires sur son uvre.
Les contes de la solitude souvrent sur un prologue qui décrit une maison de Sarajevo, où, lorsquil se prépare et se met au travail, « ne cessent daffluer, avec une multitude de détails minutieux, personnages des récits et fragments de leurs conversations, réflexions et comportements. Viennent ensuite frapper à la porte (de son imaginaire) un vizir déchu, un menteur invétéré, un aventurier français en pays ottoman,, un prince aux yeux tristes, un directeur de cirque malheureux en amour, une prostituée au grand cur, un géomètre jaloux, une esclave suicidaire chaque personnage est une partie dhumanité avec sa grandeur et ses petitesses décrites par un épicurien dans la lignée dEpitecte. En France, vous trouverez des uvres de Andric en livres de poche.
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Lors de notre escapade en Bosnie, notre guide croate, Léonida, nous a communiqué deux autres noms décrivains : Miroslav Krleza et Slavenko Draculic. Nous navons pas trouvé de traduction française du second mais Miroslav Krleza, considéré comme la figure centrale de la littérature croate au 20ème siècle, est publié en France. Il est né à Zagreb en 1893 et sa mort remonte à 1981. Il a écrit dans tous les genres littéraires. Il sest opposé aux autorités austro- hongroises , puis à la monarchie yougoslave. Il sest ensuite rapproché du parti communiste et a été récupéré par le parti titiste sans avoir été un idéologue. Lorsquil réfute la formule de Naumann sur lunité de la « Mitteleurope » utilisée comme prétexte politique par le pangermanisme et limpérialisme autrichien, Krleza restait fidèle aux prises de position de sa jeunesse : "cest le point de vue dun homme qui a souffert, du temps de lAutriche-Hongrie, de son appartenance à une nation vassale, la croate" (selon lincontournable Matvejevitch). On peut citer parmi ses uvres traduites : Mars dieu Croate (recueil de nouvelles mettant en scène un paysan croate victime de la machine militaire austro-hongroise), Le balades de Petritsa Kerempouh ( uvre poétique racontant lhistoire de lhomme croate à travers lHistoire) Le retour de Philippe Latinowicz ( roman dont le personnage principal est un peintre introverti, en conflit avec les milieux socioculturels croates. Il souligne lantagonisme entre une vision régionaliste étroite et une vision universaliste).
Une thèse de doctorat présentée par Sinbeva Katunaric-Béné en 2001 souligne limportance de Mirosla Krleza. Elle est intitulée « Deux écrivains dans le siècle. André Malraux, Miroslav Krleza littéraire de lentre-deux-guerre ».
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Bien sûr, cet article nest quune modeste approche de la littérature croate qui compte dautres écrivains dignes dintérêt. On peut citer parmi les poètes, Radivan Ivsic et Tin Ujevic. Parmi les écrivains contemporains, nous avons découvert une femme, Marica Bodrozic, née en 1973 en Dalmatie et qui sest imposée dabord en Allemagne avec un premier roman traduit depuis lors en français sous le titre « Tito est mort » : un recueil de nouvelles dont les récits nous plongent dans la paysannerie du Sud croate au début des années 1980. Il faut souligner que les plus grands écrivains croates du 20ème siècle ont partagé lhistoire de la Yougoslavie et une langue commune dans cette entité géopolitique disparue. Certains ont du sexpatrier dans divers pays dEurope et dAmérique. Les sujets contemporains les plus abordés sont tout naturellement lidentité culturelle, le nationalisme et les guerres dindépendance. Il apparaît souhaitable de ne pas se limiter à la Croatie et de sintéresser aux écrivains issus de toute la Yougoslavie. Certains nont jamais été traduits en français et notamment Radomir Konstantinovic, né en 1928 en Serbie, qui est décrit par Rada Ivekovic ( sur le site République des lettres ) comme « une grande figure isolée de la littérature et de la philosophie européennes ». Il est lauteur de La mort de Descartes et de La philosophie du bourg, ouvrages qui attendent toujours une traduction française.
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On ne peut évoquer la littérature croate, sans rappeler que, au IXème siècle, lécriture glagolitique y est inventée pour faciliter la christianisation des peuples slaves. La dévotion pour la langue écrite, mode de transmission de la culture classique et apanage dune nouvelle classe sociale que ce soit en caractères latins ou glagolitiques restait une marque de la culture croate au Moyen âge et au-delà. Le latin demeura la langue officielle au Sabor, le Parlement croate, jusquau milieu du XIXème siècle, à une époque où la langue littéraire croate était pourtant déjà fixée. Alors que la Croatie a adopté lécriture latine, les Serbes ont choisi la cyrillique.
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Nous avons résidé à Dubrovnik, dans le quartier de Babin Kuk (traduction : hanche de la grande mer), où en prenant le bus n° 6, nous étions à 20 minutes de la vieille ville. A partir de cette ville pittroresque, escale entourée dîlots où dimmenses bateaux de croisières jettent lancre, nous avons fait des excursions : village de Cilipi et son folklore, Ston et ses 5kms de muraille, île de Korcula et ses philosophes, Mostar et son pont (Bosnie Herzegovine), et le Monténegro : la bouche de Kotor et Nicolas, enfin Budva et la Jet set. Il vous suffit dacheter un guide touristique ou de surfer sur le Web pour trouver des photographies montrant la beauté de ces pays où la mer pénètre les terres montagneuses, multipliant les fjords, les presquîles et les îlots.
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Lîle de Korcula et à son école philosophique avec Matvejevitch :
Extrait :« Nous nous retrouvions dans lîle de Korcula. En 1971, les organisateurs me proposèrent dentrer dans le conseil de cette école hérétique, au moment où elle subissait les pires avanies, attaquée aussi bien par les bureaucrates au pouvoir que des particularistes qui régentaient la culture. Je me retrouvais parmi des intellectuels qui, comme moi, cherchaient leur salut. Je rencontrais là le vieux Ernst Roch, marqué par son passage forcé de lAllemagne de lEst à celle de lOuest, Herbart Marcuse, au zénith de sa renommée, Henri Lefebvre avec ses soixante-huitards, Erich Fromm, en pleine maturité, Jurgen Habernas, encore jeune, Eugen Fink, Lucien Goldmann, Pierre Naville, Lombardo Radice, ainsi que de nombreux philosophes et sociologues appartenant à toutes les nationalités yougoslaves, parmi lesquels Rud Supek et Gaio Petrovitch. Aux premiers colloques assistaient également Leszek Kolakocski, venu de Pologne, et Karel Kosik, de Tchécoslovaquie. Nous lumes des passages de la lettre de « 2000 mots » et en discutâmes avant même quelle ne fût diffusée à Prague. Vinrent aussi Kostas Axelos et dautres collaborateurs des revues parisiennes Arguments et Socialisme ou Barbarie ; puis Agnès Heller, Férenz Feher et Georges Markus de Budapest, encore liés à Lukacs ; quelques amis de Sartre, autour de « linstitut Gramsci » de Rome Les Trotskistes réunis autour dErnest Mandel se manifestèrent à leur tour, ainsi que des anarchistes tels que Daniel Guerin et ses disciples, des libres penseurs comme Lelio Basso. Max Horkheiner et Theodor Adorno, fondateurs de « lécole de Francfort », sympathisèrent avec cette école dhétérodoxie. Les dirigeants soviétiques ne permirent jamais à leurs philosophes de se joindre à nous En Union soviétique, elle (lécole de Korcula) fut considérée comme « le pire des révisionnistes », ses membres qualifiés de traîtres et de calomniateurs du communisme et du socialisme. La ligue des communistes de Yougoslavie lui reprochait de se livrer à une critique de tout ce qui existe notre école et la revue Praxis furent ensevelies, en 1974. Cette même année, jadressai une lettre à Tito et lui conseillai naïvement de se retirer »
La lettre a été adressée le 17 juillet 1974. Matvejevitch y ajoute un post-scriptum dans lequel il reconnaît à Tito davoir résisté au fascisme et au stalinisme, davoir transformé les conflits fratricides en une résistance les plus puissantes dEurope lors de la seconde guerre mondiale, et davoir évité à son pays le sort de la Hongrie et de la Tchécoslovaquie sous le régime soviétique. Il lui reproche davoir gouverné trop longtemps, de sêtre entouré dincapables, de flatteurs et de politicards, davoir fait passé en premier ses ambitions dacteur mondial et, par sa culture politique acquise en Union soviétique, son incapacité à affronter les problèmes de la démocratie moderne. Il ajoute : « Dans un pays plurinational, les responsabilités, au lieu de sadditionner, se multiplient. »
Dubrovnik et la Croatie :<o:p></o:p>
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« Il est difficile dimaginer une ville qui offre à la vue plus dunité, qui soit dune solidité plus reposante. Tout est simple et fort : une loggia quon aperçoit de biais, le sol dune rue aux larges dalles qui fuit entre deux lignes de toits : ou là-bas ces trois terrasses étagées comme les paliers dun temple. Mais la merveille du site, linstrument de charme inépuisable est ce chemin de ronde qui contourne la ville. Il vous promène un peu au dessus delle » Jules Romains, extrait de « Les Hommes de bonne Volonté ».
« La longue file beige et grise de touristes sétirait dans la grande rue de Raguse Les montagnes pelées de lHerzégovine maintenaient Raguse sous des feux de miroirs ardents. » Marguerite Yourcenar , extrait de « Nouvelles orientales »<o:p></o:p>
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« Raguse » ( Rocher ) est lancien nom de Dubrovnic. En parlant des habitants de Dubrovnic, on dit encore les Ragusains. Dubrovnik a subi un important tremblement de terre en 1667 dont certains murs gardent encore la trace. Elle a été sous occupation française pendant 9 ans à partir de 1809 (armée napoléonienne) puis est passée sous domination autrichienne. Après loccupation austro-hongroise, la création du Royaume yougoslave (1918-1940) puis le communisme (1940 à 1991), la Croatie est devenue indépendante en 1991 et a été reconnue par lUnion Européenne en 1992. Elle est entrée dans deux conflits armés, en 1991 avec la Serbie et en 1993 avec la Bosnie. Le 6 décembre 1992, Dubrovnik a été bombardée par les Serbes, après que leau et lélectricité aient été coupées aux habitants de la ville assiégée. Les dernières guerres dans les Balkans ont duré 4 ans, jusquen 1995.
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En 2007, la Croatie devrait entrer dans lUnion Européenne. Cette entrée alimente les conversations et se fera sans grand enthousiasme puisque 70% des Croates y seraient opposés par crainte de la montée des prix dans un pays où le salaire moyen est de 650 euros et où la reconstruction est financée par la manne touristique. Beaucoup de Croates, comme Matvejevitch, pensent que la communauté européenne méprise les pays de lEst pour leur pauvreté et leur impose des conditions trop draconiennes pour faire partie de cette union. Malgré leurs bas salaires, les Croates sen sortent par une politique daccession à la propriété et des revenus immobiliers (locations touristiques). La taxe foncière nexiste pas. La solidarité (nationale et familiale) explique labsence de mendiants dans les rues et le sentiment de sécurité dans un pays où la délinquance est très inférieure à ce que nous connaissons en France. Le taux de chômage est de18% mais baisse jusquà 11% en été par les emplois saisonniers. Lallocation de chômage est de 120 Euros tous les trois mois. La Sécurité sociale prend en charge les visites médicales chez les généralistes et les médicaments prescrits sont gratuits. Les enfants vont à lécole à partir de 7 ans. Cest le système du contrôle continu qui est appliqué pour la délivrance des diplômes. Les études se terminent par une grande soirée avec les profs. Lâge de la retraite est à 65 ans. La population est très majoritairement catholique.
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Dans une ville comme Dubrovnik, les prix de limmobilier ont augmenté de façon exponentielle jusquà atteindre 9 à 10.000 euros le mètre carré dans la ville historique (intra muros). Les capitaux étrangers sont à lorigine de cette envolée et notamment les capitaux de nouveaux milliardaires russes. Aujourdhui, 7,2 kunas (monnaie nationale) correspondent à 1 euros (1 kunas est léquivalent de 90 centimes de Franc et se divise en 100 lipas). Des appartements sont loués aux touristes pour un prix journalier moyen de 90 euros. La Croatie met en avant labsence de pollution et la sécurité comme arguments touristiques. Cest encore vrai. Le coût de la vie est encore favorable au tourisme français car les prix sont inférieurs denviron 10% par rapport à notre pays, bien que les produits y soient davantage taxés (ce qui nest pas le cas en Bosnie Herzégovine où les prix sont encore inférieurs à ceux de la Croatie ).
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Nous avons relevé, de façon anecdotique, que la longueur du bras de Roland de Roncevaux (à qui on a érigé une statue dans la ville historique de Dubrovnic) a servi de mesure avant dêtre remplacé par le système métrique, et, pour un zeste dhistoire, que Napoléon Bonaparte a joué un rôle bénéfique dans la modernisation de la Croatie, notamment en matière dinfrastructure routière et de législation. Tito conserve une bonne image et non pas celle dun dictateur comme le Roumain Ceaucescu, même si il a, lui aussi, abusé des procès politiques, de la censure et du culte de la personnalité. Il nous a été dit que « Tito nétait pas un dictateur. Il était apprécié par tout le monde ». Il faut rappeler que Tito était dorigine croate. Feu Milosevic le Serbe est désigné comme le responsable des dernières guerres et donc comme le mauvais sujet des nationalismes dans les Balkans avec sa grande Serbie : rêve dun mégalomane et cauchemar des populations des Balkans.
En Bosnie Herzégovine, à Mostar où un pont relie les parties chrétienne et musulmane, il nous a été dit que, en novembre 1993, la destruction de ce pont construit au 16ème siècle navait pas divisé les deux communautés et quelles avaient toujours rétabli un passage entre les deux rives. Ce pont reconstruit en 2004 à lidentique (et appelé le vieux nouveau pont ) reste un symbole fort des relations qui devraient exister entre toutes les communautés religieuses (voir photo). Aucune précision na été fournie sur les auteurs de la dernière destruction mais nous avons appris que les bombes étaient croates. De jeunes hommes plongent de 25 mètres (milieu du Pont) dans la Néréva. Alors quen Croatie, la reconstruction a fait disparaître une grande partie des destructions dues aux dernières guerres, les dégâts sont plus visibles en Bosnie où certains bâtiments en moitié effondrés et criblés dimpacts témoignent de la violence des combats. Si vous allez en Bosnie, sachez que la monnaie nationale est le Mark compensé mais que vous pouvez payer en Kunas ou en Euro. Le calcul est simple, on vous divise laddition par deux pour payer en euros et elle est multipliée par 4 pour les Kunas. La Bosnie, agressée par la Serbie de Milosévic, a été libérée par lOTAN après 4 ans de Guerre (dont un an contre les Croates en 1993). La paix a été lobjet des accords de Dayton en 1995. Si vous passez par Mostar, aller au restaurant « Stari Mlin » ( le Vieux moulin). Vous pourrez y goûter une spécialité le « cévapcici » ( prix du plat 2,5 euros). <o:p></o:p>
Sarajevo sera associé au regret de navoir pas eu la possibilité dy faire une excursion. Il paraît que cest une ville qui a une âme. Notre guide Léonida nous a dit « Quand on arrive à Sarajevo, on se sent bien et les gens y sont très accueillants ». Nous nattendrons pas les prochains jeux olympiques dans cette ville pour aller y passer un week-end.
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Dans le Monténégro, fraîchement indépendant, des véhicules roulent sans plaque minéralogique dans lattente dune première immatriculation monténégrine. Les monténégrins ont une réputation de méditerranéens, cest-à-dire dêtre peu travailleurs et donc plutôt fainéants. Ainsi, sous quelque latitude que nous nous trouvions, plus un peuple est au sud, plus il est entouré par la mer, et plus les mêmes traits de caricature (et non de caractère) reviennent dans les imaginaires collectifs de ceux qui vivent plus au Nord. La guide croate, Sonia, nous a énuméré les dix commandements du Monténégrin dont nous reportons un court extrait: « Chaque homme est né fatigué Quand vous voulez travailler, attendez que ça vous passe. » Le Monténegro utilise déjà lEuro comme monnaie nationale bien que ne faisant pas encore partie de la communauté européenne : une curiosité de la géopolitique européenne puisque la Grande Bretagne, composante importante de lUE, a refusé l Euro, préférant royalement garder la Livre Sterling. Contrairement à la Croatie et à la Bosnie Herzégovine, nous y avons croisé quelques gitanes tendant la main, notamment à Budva, station balnéaire devenue le rendez-vous de la Jet-set après Saint-Tropez.
Nous avons préféré Kotor, ville vénitienne située au fond dun immense fjord ( la bouche de Kotor) entouré de montagnes noires, avec ses trois portes donnant respectivement sur la mer, la terre et la rivière, ses palais à trois niveaux de styles différents ( gothique, renaissance et baroque ), ses petits commerces et le charme de ses ruelles.
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