• Une belle histoire belge

    Sympathiques ou franchement immondes, les "Branques" et "Pieds nickelés" sont légions dans les romans noirs et ne sont pas toujours des flics. Cette année, Lucas BELVAUX a présenté son film "La raison du plus faible" au festival de Cannes sans y obtenir de récompense: ce qui est une faible raison de ne pas aller le voir.

    Le contexte du film rappelle celui du film anglais "The full Monthy", mais, chez BELVAUX, les chômeurs sont des Belges et , au lieu de s'entraîner à devenir des Shippendales, ils préparent un casse. Les régles du banditisme changent et ce n'est plus la raison du plus fort qui l'emporte. Les faibles sont les nouveaux pauvres, privés de travail et exclus de la société qui trouvent un sursaut d'orgueil pour avoir le courage d'agir dans un baroud qui serait une revanche sur leurs vies volées d'ouvriers trahis, faute de pouvoir gagner un gros lot à une loterie nationale.

    Lucas BELVAUX situe l'action dans le plat pays de BREL, au milieu d'un de ces vestiges de l'industrialisation où les hommes ont pour horizon des bâtiments d'usine, fleurons de la métallurgie. Désabusés par l'impuissance syndicale, des ouvriers se retrouvent privés d'un travail dont ils étaient fiers, par un "patronanonymat" d'investisseurs. Comme chacun le sait , l'oisiveté n'est pas bonne conseillère, surtout lorsqu'elle est la conséquence d'une grave frustration. Des braves chômeurs belges s'énervent à taper le carton dans un troquet et perdent leurs rêves de richesses au Loto. Leur solidarité de travaiilleurs et leurs luttes sociales passées les aident à ne pas sombrer totalement dans le désespoir, lorsque leur énérgie à resister les pousse à refuser la fatalité. Parmi eux une femme, Carole, s'échine et sue sa santé dans une usine de repassage. Elle a encore la chance d'avoir un travail. Cet ultime chance est malmenée par une panne de vélomoteur et des retards de bus. Ses dificultés vont agir comme un coup de foudre et déclencher la révolte. Il ne sera plus question de renoncer à des rêves de vie meilleure. Il faudra prendre l'argent là où il est. Il ne s'agit pas d'accomplir un acte immoral mais de bénéficier d'un juste retour sur investissements en effort et temps, en sueur et vie. Ce serait comme un remboursement sur leur vie bradée... Pour la suite, nous nous associons , sans ièdeur, au magazine avignonais "Utopia", dans sa critique enthousiaste lorsque nous lisons: " Ce qu'il adviendra d'eux: vous verrez bien , et le film va prendre des airs superbes de film noir, mené tambour battant sur une musique qui est un régal dans le genre. D'ailleurs tout est beau dans ce film et les images, en scope magnifique, ont une ampleur qui vous file le frisson... Un film porté par un soufle épique et néanmoins drôle et modeste. On y passe, sans le moindre temps mort, de l'exaltation à l'émotion, du rire à la colère, du suspense à l'émotion rigolarde.."

    Faites comme moi. Allez le voir! Lucas BELVAUX s'applique à faire du cinématographe. Il crée là où d'autres fabriquent. Il y met de l'humanité. Lorsqu'il s'agit de genre noir , l'umanité et le social forment l'essentiel de cette culture ancrée ( ou encrée) dans le présent.

    Dans l'article de la gazette Utopia, le rédacteur avoue qu'il enrage de ne pas voir ce film palmé entre "Indigènes" et Ken Loach. Pour le consoler, Corse noire lui délivre à l'unanimité du Jury "le figatellu d'or" pour rire et "le myrte d'or" pour la saveur.

    Début non sérieux d'anthologie des Branques et des Pieds nickelés:

    Dans le genre policier ou noir , on ne rencontre pas que de grands criminels pervers dont le machhiavélisme entraîne des diffcultés quasi insurmontables pour les confondre, surtout lorsque, face à eux, officient des flics ripoux ou imbéciles. Ces professionnels du crime, sans scrupule et sans pitié, n'ont aucune excuse. Par ailleurs, on pourrait établir un florilège d'une délinquance moins experte et plus humaine en commençant par le genre burlesque. Dans "Faites sauter la banque", Victor Granier ( joué par De Funès), commerçant en articles de chasse et de pêche ruiné par un placement dans des actions au Tangana, entraîne sa famille dans le casse de sa banque, en creusant un tunnel. Dans le film " Prends l'oseille et tire-toi", Woody Allen se met en scène deans le rôle d'un ganster malchanceux. Plus récemment, Bob Swain a adapté en comédie policière, intitulée "Nos amis les flics", le roman de Jay Cronley " Le casse du siècle" ( "Cheap Shot" étant le titre original ). L'amateurisme de quatre branquignoles va donner des idées à un truand chevronné ( joué par Daniel Auteuil) pour réaliser un braquage audacieux puisqu'il commence par la prise en otages de tous les flics d'un commissariat de police. On pense alors aussi au premier roman de Chistian Roux "Braquages" dans lequel quatre SDF sont recrutés par un individu mystérieux pour braquer. Et puis , il y a le titre du dernier opus de Patrick Pécherot " Boulevrad des Branques" qui annonce une brochette de truands, nazis, collabos beaucoup moins sympathiques que les SDF de Roux our les Pieds Nickelés de Jay Cronley. A propos de ce dernier, il est l'auteur aussi de la fameuse "Java de Loquedus". Son personnage "Trou'" offre des similitudes avec celui de son ami Weslake ( John Dotmunder). Les amitiés entre auteurs seraient-elles à l'origine des quelques cousinages de leurs héros?
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