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Corse noire

... soeur de vos nuits blanches...


Label flic, suite du Nervi par Michel JACQUET

Publié par Difrade sur 25 Mai 2007, 10:38am

A Marseille, il ne faut pas confondre " boucan " et " Boucain ". Le " boucan " est celui ou celle qui ne peut vous attirer que des ennuis, c’est-à-dire celui ou celle qui vous emboucane … vous pourrit la vie… alors que le Boucain est l’habitant de la petite cité de Bouc bel air, à une poignée de kilomètres de Marseille.

Michel Jacquet est un Boucain qui écrit des bouquins dans lesquels on peut éventuellement rencontrer des boucans.

Les trois romans précédents:




Nous avions déjà évoqué dans un précédent article ses ouvrages, " La rouste " et " Le Nervi ". Nous avions annoncé la prochaine parution d’une suite.
                              L’auteur l’a écrite : " Label flic ".
Le Nervi a le label d’une qualité juridique que, retraité, il n’exerce plus officiellement. C’est aussi une étiquette collée à vie, presque comme une seconde peau. Chez le Nervi, c’est devenu un label indépendant et une appellation d’origine incontrôlable. Si son activité principale est devenue la sculpture sur bois d’olivier et la vente sur les marchés, Raymond Garcia reste le Nervi pour ses anciens collègues et quelques gros bonnets de la pègre locale… La retraite en a fait un électron libre et ses seuls liens sont ceux de l’amitié, parfois l'amour...

Rappel : " Le Nervi, monsieur, c’est le surnom que mes amis m’ont donné pendant une trentaine d’années. Chez nous, en Provence, nous appelons comme cela les hommes forts, très musclés. Mais aussi les hommes qui aimaient, à l’époque, traîner autour du port à l’affût du moindre coup foireux. Et enfin, ceux qui aimaient le contact physique avec d’autres marlous… "
Nous ajouterons, mais ce n’est pas le cas de notre héros, que, dans le reste de la France et selon le petit Robert (l’indic de La rousse), un nervi est aussi un portefaix, un tueur, un homme de main. Si notre Nervi est un homme de main, il s’agit de la main de la Justice dont on sait qu’elle peut être immanente. Si on évoque la morale, celle du Nervi n’est pas kantienne et il n’a pas l’intention de se couper les mains pour les garder propres. Ses mains lui servent à créer mais aussi à boxer ou appuyer sur la détente. Ancien flic de la Criminelle, Raymond Garcia, alias Le Nervi, est installé dans sa retraite et la soixantaine passée. Avec ses mains de cogneur, il sculpte, dans le bois d’olivier et le cep de vigne, des objets qu’il vend sur un marché de Provence.






Les premières lignes de Label flic :

" HEUREUSE ET DÉTENDUE, SOPHIE SOURIAIT À PLEINES dents. La jeune femme brune, âgée d'une vingtaine d'années, pressentait que ce soir elle arriverait enfin à obliger le tas de muscles qui se trouvait face à elle à se dévoiler. Elle le connaissait depuis plus d'un an mais ignorait presque tout de sa vie antérieure.
Raymond, solitaire par nature, n'aimait guère se laisser aller à des confidences intimes. Ce retraité de la police, reconverti dans la fabrication d'objets hétéroclites en bois d'olivier, vendait son produit sur les marchés de Provence. Tous d'eux s'étaient d'ailleurs connus lors d'un déballage, côte à côte à Gardanne, un dimanche matin. Depuis, ils ne s'étaient plus quittés. Chacun habitait chez soi mais il n'était pas rare que Sophie vienne passer une nuit ou quelques jours chez son ami. Presque quarante ans les séparaient, mais ils n'y attachaient aucune importance. Ils avaient trouvé en l'autre ce qui leur manquait, lui une fille, elle un père. C'est du moins comme cela qu'ils se plaisaient à définir leur relation.
La gamine avait fait un véritable forcing. Quelques bûches enflammées dans l'âtre de la cheminée, une lumière douce distillée par une lampe de salon déposée à même le sol et un excellent château-simone rouge, un coteau d'Aix-en-Provence de bonne qualité, généraient une ambiance très agréable, propice à quelques confessions.
Le fort mistral qui soufflait depuis plusieurs jours apportait un bruit de fond naturel, une musique presque sifflante, envoûtante. Tous les ingrédients réunis pour que l'on se sente bien à l'intérieur de ce mas, en ce mois d'octobre, à proximité du village de Fuveau.
Sans même s'en rendre compte, le Nervi, petit à petit, s'était laissé séduire par l'atmosphère. Sophie, assise à ses pieds sur le tapis qui trônait au milieu de la pièce, posa sa tête sur les genoux de l'homme. Lui, naturellement, caressa les cheveux de la gamine. Il était conquis, charmé.
Elle voulut lui demander : "Dessine-moi un mouton !" L'idée l'amusa et faillit la faire rire mais la jeune femme se ravisa.
- Parle-moi de toi, parle-moi d'avant, quand tu étais jeune, un "minot" comme vous dites ici.
Il ferma les paupières et but une gorgée de vin. Il garda en bouche le précieux liquide quelques instants. Il comprit, à ce moment précis, que le piège s'était refermé sur lui et qu'il ne pouvait échapper à un interrogatoire en règle. "

Dans Label flic, le Nervi se dévoile davantage. Sur les marchés de Provence, il a connu Sophie. Quarante ans les séparent et ils se sont liés d’un amour platonique. Un feu de cheminée, quelques verres de rouge château Simone (un vin des coteaux d’Aix-en-Provence un peu cher mais excellent), un léger mistral, la tête de Sophie reposant sur ses genoux, le Nervi se laisse aller à quelques confidences intimes : Son amour pour son grand-père Gustave, son célibat, son surnom de Nervi qui impressionne les voyous… Trois premières pages de quiétude et de souvenirs, puis nous laissons un temps le Nervi à ses rêves d’enfance et entrons dans les arcanes de l’Evêché. Ce nom est communément donné à l’hôtel de police de Marseille dont la moitié ancienne était habitée jadis par l’épiscopat marseillais et cachait des ramifications souterraines la reliant à la cathédrale de la Majore. Seul le nom " Evêché " a survécu à la sécularisation des lieux devenus le confessionnal des malfrats et l’antichambre des geôles de la République. Et puis, les bons policiers y entretiennent leur foi tandis que certains " éméchés ", comme un certain Lucien Grammier, y détruisent leur foie.

Dans un bureau de la brigade des Stupéfiants, un Junky (un type qui vendrait sa mère pour se procurer une dose de drogue) balance son dealer qui, peu de temps après, est retrouvé mort, tué presque sous les yeux de deux flics qui surveillaient son domicile… C’est le début d’une série de meurtres… Le trio des tueurs (deux hommes et une femme) utilisent des tenues d’uniforme de la police nationale. L’arme utilisée est un stylet, " ce fameux couteau corse à lame très fine ". Un flic alcoolique, ami du Nervi, s’intéresse à l’affaire puis devient le principal suspect ; " Trompe la mort " devenu " Bois sans soif ", policier à la dérive, se réfugie chez le Nervi. Pour tirer l’affaire au clair, le retraité va devoir abandonner provisoirement la réalisation et la vente des sculptures en bois d’olivier sur les marchés… Il s’la donne à donf ! Alors, mèfi ! Pour cela, il fait appel à ses deux vieux coéquipiers qui ressemblent à ceux du célèbre San Antonio : le Mammouth ressemble fort à Béru et le Criquet à Pinaud. ( Nous voulons parler de Alexandre-Benoît Bérurier, dit Béru, qui est un véritable porc, une armoire à glace plus douée pour la castagne que pour la finesse, mais aussi un excellent professionnel. Pinaud, dit Pinuche ou Débris, est un policier radoteur à l'allure de vieillard à moitié sénile, à se demander pourquoi il n'est pas à la retraite depuis longtemps. Mais cette apparence cache un policier hors pair).

Label Flic est aussi une histoire d’amitié et de trahison au sein même de la police. Michel Jacquet met en scène des flics anciens dont les vies ont ou auraient pu basculer du mauvais côté. Entre générations de policiers, les méthodes ne sont pas les mêmes mais il existe tout de même une filiation. Lors du repas annuel des anciens, ce sont le Mammouth, le Criquet, le Marquis, l’Estrasse, le Chamois, le Cube, Tête plate, le Gitan et autres vieux poulets qui répondent présents.

Le Nervi est un ancien qui enquête à l’ancienne. Le droit à l’erreur et la fin qui justifie les moyens sont ses seules règles face à des truands sans foi ni loi. Avec Mammouth et le Criquet, il forme un trio opérationnel de choc. L’intrigue se dénoue dans la pègre locale où évolue une mystérieuse femme… Le Nervi sera-t-il à la hauteur de sa réputation ? A vous de le découvrir.

Un auteur italien très connu, Andréa G. Pinketts a dédicacé " Label flic " et il écrit : " Ce n’est pas par hasard que Label flic " commence par un rapprochement amoureux et qu’il se termine avec la douloureuse et tendre conscience d’un homme dur, câliné par son grand-père et en dérive avec la vie, substantiellement un flic qui investigue sur ce qui, au fond, reste ; l’amitié. Et alors, je peux absolument confirmer que Michel, Raymond, appelé le Nervi, a beaucoup d’amis outre Mammouth et Criquet, mythologiques dans leur essentialité. C’est moi le nouvel ami. "

Le prochain livre de Michel Jacquet est déjà en gestation. Au départ, il devait avoir pour héroïne une "cagole" de la Belle de Mai mêlée à une intrigue... policière bien sûr. Pour ceux qui ne le savent pas, " cagole " vient du vocable " cague " qui a donné le verbe " caguer " (chier ). La cagole est une fille trop maquillée et montée sur pilotis (talons très hauts) à l’allure vulgaire qu’avaient les prostituées, arpenteuses de trottoirs sur lesquels on peut voir aujourd’hui des cagoles éviter les cagues de chiens).

Michel Jacquet, au fil de l’écriture, n’a pu se résoudre à cette image péjorative et trop superficielle d’une fille issue du petit peuple de la Belle de mai… A la corbeille la cagole devenue une cagade littéraire (cagade signifiant " grossière erreur ou bêtise ") ! Pour son prochain roman, il nous présente une vraie héroïne de roman : Nina, une beauté méridionale conforme au joli nom de la Belle de Mai, quartier populaire du 3ème arrondissement de Marseille : " Concernant Nina, dit-il, j'ai préféré enlever ce coté cagole. J'ai trouvé qu'il était déplacé. En fait il était trop en décalage par apport à l'aventure qui arrive à cette femme. Donc pour parler de Nina c'est une jeune femme d'une trentaine d'année qui travaille dans une maison de retraite. Elle fait la connaissance de "Chouchou". Un homme d'une cinquantaine d'année élégant, charmant. Tous deux tombent amoureux. C'est à partir de ce moment là que l'histoire démarre. La jeune femme se retrouve involontairement mêlé à une équipe de mafieux de l'est mêlés entre autres aux trafics en tous genres : Femmes, cigarettes, drogue et j'en passe. Elle combattra avec fougue et vigueur ces voyous qui tentent de la tuer. Des personnages truculents vivent autour d'elle, Ma Moune, Loule et Papy Moustache entre autres, sans oublier le vieux bandit marseillais indispensable pour ce genre de récit. Un vrai faux polar en fait mais un moment de détente ou se mêle l'amour, l'amitié et surtout la dérision, la caricature ".

L’inventeur du Nervi raconte toujours des aventures viriles mais sans machisme. Ses personnages féminins ne sont pas des cagoles. Dans Label Flic, le capitaine de police Florence Buget et Lucie, la tueuse, tiennent la dragée haute aux mecs, et les enquêtes du Nervi sont des récits habités par des personnages récurrents attachants.



Avec Label flic, vous pourrez encore enrichir votre champ lexical de quelques vocables introuvables dans le petit Robert et le Larousse. Nous vous fournissons un petit lexique :

- Mèfi ! interjection qui vient de " se méfier " et qui est une mise en garde ou le signalement d’un danger.
- Une estrasse : à l’origine , c’est une guenille, un vêtement vieux ou de mauvais goût. Le mot désigne aussi quelqu’un de mal habillé mais aussi en qui on ne peut pas faire confiance, sans moralité. Par contre le verbe " s’estrasser " signifie éclater de rire.
- Un chapacan : terme voisin d’estrasse puisqu’il désigne quelqu’un sans scrupule ou mal habillé, débraillé.
- Se néguer : se noyer
- L’engambi : un problème, une difficulté voire une embrouille volontaire ou même une petite traîtrise.
- Un fadoli : un mec un peu fêlé du cerveau, l’idiot ou le gentil fada. Et fada ? Le mot viendrait du provençal " fàdo ", la fée. Le fada serait une personne enchantée par les fées, bizarre, voire dérangé mentalement. Mais on peut être fada d’une belle fille ou fada de l’OM et là le mot est synonyme de passionné et non d’idiot.
- Morfler : recevoir des coups mais aussi accuser le coup sous le poids des ans, de la fatigue, des ennuis, des échecs…
- Un gobi est un petit poisson avec de gros yeux. On fait des yeux de gobi sous l’effet de l’étonnement. A ne pas confondre avec " avoir le gaubi " qui veut dire être à l’aise, être beau parleur, être bien dans ses baskets.
- Minot ou Niston et nine ou nistonne : petit garçon et petite fille.
- Taulier : chef de service dans la police.
- Le toti : l’ imbécile, le balourd.
- Tu t’la donnes à donf : Tu te donnes à fond.



Cette année Michel Jacquet sera dans la caravane des Nocturnes littéraires qui auront lieu la dernière semaine de juillet et la première quinzaine d’août. Cette caravane du livre s’arrêtera à Marseille, Sausset, La Ciotat, Bormes les mimosas, Toulon, Cassis, les Sablettes, Aix en Provence, Six fours etc… Pour plus de renseignements consulter le site Internet de l’auteur à la rubrique " actualité " :
www.michel-jacquet.com



Avec le succès, viennent aussi les récompenses et distinctions. Michel Jacquet et Lilian Berthelot ont reçu le prix du jury du festival "Le noir dans le blanc" de Vars pour une nouvelle intitulée "L'ivresse décime" ".


Un extrait de " La neige décime " :
Mais depuis quand Bathelot avait-il disparu ? De Guillestre jusqu’au refuge Napoléon, la question restait posée… Amateurs ou professionnels, les limiers se perdaient en conjectures, comme disent les gazettes. Lilian, le Sétois et son accent qui sentait l’anchois et le pastis, manquait cruellement à la joyeuse confrérie des polardeux du " Noir dans le Blanc ". Aucune trace à part les empreintes creusées par les motoneiges sur la neige fraîche.
Les conjonctures se multipliaient au même rythme que les verres de génépi dans les gosiers en pente d’Eric Hossan et Thierry Crifo. Quant au flic Michel Jacquet, entre un match de l’OM et une rouste à coup de Minitel sur de malchanceux pré-mis-en-examen, Jacquet donc était dans le shwartz. Le noir si vous voulez, comme une soutane, comme un tunnel sans néon et sans fin. Bathelot avait bien disparu entre l’office du tourisme et la résidence Pierre et Vacances. Ca sentait le roussi et le Smalto noir, un parfum enivrant généreusement répandu dans la station.
Lilian réapparut le dernier de cette troisième édition. Il s’était consacré, disait-il, à quelques devoirs de vacances – comment écrire une nouvelle policière – auprès de têtes blondes de l’école locale. A vérifier…



Pour plus sur la toile :

Bibliographie complète directement à l’adresse :
http://www.michel-jacquet.com/bibliographie_096.htm

Agenda volumineux directement à l’adresse :
http://www.michel-jacquet.com/actualite_105.htm


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